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puce Marion Cousineau et Jacques Rochon chantent Allain Leprest
Le Connétable  (Paris)  lundi 6 juin 2015

La québécoise Marion Cousineau n’est pas tout à fait une inconnue : elle fait partie des nombreux jeunes gens qui gravitent autour de JeHaN – pour lequel elle a signé plusieurs textes, qu’il joue déjà en concert et enregistrera peut-être un jour (puisqu’il évoque depuis longtemps l’idée d’un album intégralement consacré à des plumes féminines). Après l’avoir souvent croisée aux spectacles Leprest – Claire Elzière au Lucernaire ; Pierron, JeHaN et Lemonnier au Limonaire, etc. – on n’est guère surpris de la voir rendre aujourd’hui son propre hommage au poète de Mont-Saint-Aignan. Le récital, déjà bien rôdé au Québec, a été donné deux fois en France ce mois-ci : d’abord au Resto-Zinc le 4 juin, puis au Connétable deux jours plus tard.

Marion Cousineau chante (debout) et joue de la basse. Jacques Rochon chante et joue du piano (assis). Configuration rare – en tout cas chez Leprest, souvent accompagné de pianistes et contrebassistes, rarement par une basse électrique – qui apporte une certaine fraîcheur. Exemple : le riff de "C’est peut-être" – un peu le "Satisfaction" de la chanson à texte, gimmick reconnaissable entre mille – prend à la basse une tournure plus funky. Par ailleurs, elle s’avère extrêmement sensuelle entre les mains d’une femme : au-delà des courbes de l’instrument révélant incidemment celles du corps (la forme d’un sein, par exemple), le mariage des notes basses avec les tons hauts est tout à fait délectable. Mention spéciale à "Sarment" où, s’accompagnant seule, Marion Cousineau tisse une toile arpégée d’une grande douceur, principalement à base de "hammer on" et "pull off" : les ressorts de l’amplification n’ont guère de secrets pour elle – et la virtuosité est encore plus délectable quand on ne la remarque pas.

Autre nouveauté : l’accent québécois. Entendre "Mec", monologue d’amour d’un bavard à son ami taiseux, dit par une femme à l’accent si chantant, ajoute encore au plaisir. On redécouvre le texte d’une autre façon – d’autant plus qu’elle le dit sans micro et sans musique (Fabrice Plaquevent, compositeur de la version originelle, a l’habitude – cf son livre Le Cri Violet, L’Harmattan, 2013). Si Marion Cousineau perd un peu l’accent quand elle chante, son complice Jacques Rochon le garde en toutes circonstances – ce qui nous vaut une version de "Bilou" où le torrent de larmes évoque plus le Saint-Laurent que la Seine, sans qu’on y perde au change.

L’alternance permet de varier les climats : Cousineau chante avec une émotivité non-feinte (yeux clos, toute en mimiques, elle remue ses mains sur ses cordes – ou étreint un instrument imaginaire quand elle a posé le sien). Rochon, de son côté, a un côté pince-sans-rire qui convient parfaitement aux chansons humoristiques ("Le Mime", "Le Café littéraire") et ajoute une distance bienvenue à des choses d’ordinaire plus sombres (on a éclaté de rire en l’entendant dire "Avec toi j’ai appris à parler végétal / Et je compte les jours comme autant de pétales", dans "Arrose les fleurs"). Ainsi, le récital n’est pas complètement plombé – trop d’émotion tuerait l’émotion – mais rappelle que l’auteur de "SDF" pouvait aussi, au-delà du cliché "poète maudit", être un joyeux drille. Parfois, même, les deux voix s’accordent et inventent un troisième registre : la mélancolie souriante. C’est particulièrement réussi sur "On leur dira", qu’ils chantent ensemble mais pas à l’unisson. Il fait la mélodie principale, elle le contrepoint. Le mélange apporte des nuances nouvelles à la musique d’origine, déjà fort belle.

Le répertoire est globalement composé de "classiques", avec une forte proportion de chansons récentes, issues notamment du dernier album original (Quand auront fondu les banquises, Tacet, 2009) – avec en particulier une savoureuse reprise jazzy des "Tilleuls", plus chaloupée que l’originale. Peu de véritables surprises (deux jours auparavant, ils avaient joué le plus rare "Chien d’ivrogne", et empruntent parfois "T’as mal où camarade ?" au répertoire de Francesca Solleville), mais l’ensemble est assez frais (malgré la chaleur insupportable de la salle ce soir-là) et les interprétations suffisamment novatrices pour ne pas donner l’impression d’un best-of archi-rebattu. On redécouvre même un morceau que l’on n’aimait vraiment pas sur disque – "J’habite tant de voyages" – qui acquiert ici une grâce insoupçonnée, débarrassée de son arrangement originel assez pesant. La chanson exhale tout son suc, et l’on entend enfin le texte – où l’auteur évoquait son inadéquation au monde. Marion Cousineau le chante en regardant les cieux (en fait, le plafond de la cave du Connétable, mais elle est tellement dedans que le public y croit !)… et l’on comprend enfin tout ce que ces paroles avaient de prémonitoire.

Au final : c’est un tout petit spectacle dans la forme… mais qui fait, dans le fond, la nique à bien des concerts soi-disant plus "importants". Marion Cousineau et Jacques Rochon se complètent à merveille, et respectent Leprest sans tomber dans l’hommage empesé. Leur compréhension des chansons est si grande qu’ils peuvent se permettre de les réinventer sans les dénaturer. Avec intelligence, swing et sensibilité. Ce qui n’est pas donné à tout le monde.

[PS. Tracklisting de la soirée : "Mec". "C’est peut-être". "Une Valse pour rien". "Arrose les fleurs". "Les Tilleuls". "Bilou". "La Gitane". "Le Café littéraire". "Pauvre Lélian". "Le Temps de finir la bouteille". "Le Mime". "On leur dira". "Edith". "SDF". "Sarment". "Où vont les chevaux quand ils dorment". "J’habite tant de voyages". "J’ai peur". "Tout c’qu’est dégueulasse porte un joli nom"]

 

Nicolas Brulebois         
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