Après le très bel ouvrage d’Elsa Jonquet-Kornberg, je me suis plongé dans un autre ouvrage traitant de l’adolescence et de ses tourments. Et c’est aussi un premier roman qui nous en parle, celui d’une enseignante en philosophie devenue libraire, une jeune belge s’appelant Marie Claes. Publié chez Autrement, elle nous décrit la douleur d’exister d’une adolescente da façon brillante.
Ici, l’adolescente s’appelle Anabelle, elle a seize ans et vit avec sa mère et son jeune frère à Blevin, une petite commune belge sans histoires. Un jour, l’adolescente est frappée par une révélation qui lui dit qu’elle doit manger différemment, sans viande, sans gras et sans sucre. Cette révélation lui dit surtout qu’elle doit manger moins, beaucoup moins, pour se purifier de toute cette nourriture néfaste et superflue pour ainsi réparer le monde.
Violette, sa mère, démunie devant le délire de sa fille, se débat comme elle peut pour détourner Annabelle de son raisonnement fou. L’anorexie emporte sa fille devant elle de façon implacable.
C’est un sujet particulièrement difficile, qui touche beaucoup de jeunes filles, qu’aborde Marie Claes avec une élégance et une sensibilité qui donne une très belle dimension à l’ouvrage. L’écriture qu’elle nous propose et à la fois simple et fulgurante, ironique parfois, souvent poétique.
La lecture de l’ouvrage nous permet de bien comprendre à la fois ce qui se passe dans la tête de l’adolescence, la façon dont elle s’enferme dans cette anorexie et en même temps il nous permet de voir, d’analyser et de comprendre la réaction des adultes qui l’entourent, en particulier cette mère qui voit sa fille lui échapper et s’éloigner.
Sans jugement, sans pathos, l’ouvrage expose la lente déliquescence du corps d’Anabelle, son désir de contrôle devant un monde sur lequel elle n’a aucune prise. Un corps devenu dégoût, un monde devenu insoutenable. Consumer l’un pour réparer l’autre. Une logique aussi insensée qu’implacable. |