Action Dead Mouse,
D'ordinaire, c'est le public qui repart d'un concert avec des souvenirs. Cette fois, j'aimerais que ce soit vous. Parce que votre gentillesse, votre talent, votre simplicité, la richesse de votre musique méritent que vous ayez un long futur devant vous, pour faire le plein de souvenirs. Vous écrire aujourd'hui la mémoire riche d'un passé aventureux.
Et il faut bien que tout ce qui vous arrive ait un sens. Votre tournée est un peu maudite, c'est vrai. Et vous survolez tout ça avec le sourire des grands, des conquérants. Un rien d'insouciance. Vous êtres déjà plus loin, vous savez que tout cela n'est que le début. Votre préhistoire, votre bohème. Tout cela a bien un sens, tout cela va bien quelque part : directement dans les livres de votre histoire.
Alors, souvenez-vous, d'ores et déjà, souvenez-vous en longtemps : ce soir-là, à la Chimère de Lille, il y avait Fante en première partie, pop-rock sympathique ; vous, vous auriez mieux fait de sacrifier un chat avant la nuit, pour dissiper le mauvais œil ; ce n'était pas la pleine lune, pourtant ; quelque jours avant, votre van était mort, location, annulation de date ; the show must go on ; le public est trop rare ; la poisse pour Fante, privé d'un guitariste par la technique ; une femme saoule est venue réciter un poème pendant que l'on s'acharnait sur des amplis défaillants ; la poisse pour vous, privé de votre alto par la technique – était-ce bien le fusible ou la poisse s'est-elle acharnée sur vous plus méchamment ?
The show must go on, encore.
Ce soir-là, vous avez préféré ne pas utiliser de micro, question de son ; vocals = just shouting, vous m'avez dit ; ce soir-là, il n'y avait pas beaucoup de lumière dans la petite salle ; vous avez joué de votre math-rock complexe, tournés les uns en face des autres, le regard circulant bien entre vous, comme un dialogue à coup de rythmiques complexes, de samples de guitares, des triples-croches de la basse ; en colère et pourtant souriant, Michele est resté dans le public pour regarder les trois autres jouer ; à un moment, Luca lui a jeté un coup d'œil entre deux coups de cymbales, l'air de dire qu'il n'avait pas trébuché ; et il a trébuché sur un contretemps ou un autre.
Ce soir-là, on a mélangé votre italien, mon français, l'international anglais ; on a rit, même pas vraiment bu ; on m'avait dessiné une fleur sur la main ; pour dépanner, j'ai tenu la caisse pendant que vous vous occupiez du changement de plateau ; ce soir-là, le public était un peu rare, c'est vrai, mais vous a chaleureusement applaudi ; ce soir-là, je portais un t-shirt Froggy's Delight, en bon homme-sandwich ; en disant que mon t-shirt était trop vieux, vous m'avez vendu un des vôtres pour 10 € ; si j'y avais pensé, je vous l'aurais peut-être échangé contre le mien, comme font les footballeurs ; vous pensiez que le L serait trop grand pour moi, vous rigoliez en italien ; il me va très bien, j'ai bien fait d'insister ; je me suis dit qu'il faudrait que je fasse une photo de moi avec ce t-shirt pour vous l'envoyer, que ça vous ferait peut-être sourire – que ça vous ferait, en tout cas, un souvenir...
Portez-vous bien, Action Dead Mouse, et revenez à Lille pour nous faire un concert à quatre, avec vos micros, vos amplis, votre bus et, toujours, votre talent.
Action Dead Mouse en Inteview avec Bubba, après leur concert Stéphanois. A écouter, une fois n'est pas coutume.
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