Et si finalement sortir aujourd’hui un disque de folk/pop prônant la paix, l’amour et le respect de la nature relevait de la radicalité musicale la plus extrême ? En effet, ces thèmes, pourtant si chers à des générations d’artistes, semblent en 2007, à mille lieues de la réalité de nos sociétés. Et surtout absents de la quasi-totalité des productions actuelles.
En effet, ce Imagine Our Love semble provenir d’une époque révolue. Sans informations sur sa provenance, il pourrait tout aussi bien s’agir de l’enregistrement d’une fête de village dans le Connecticut au milieu des années 70 ou avoir été réalisé le mois dernier par une bande de vieux babs désormais établis au Danemark et jamais redescendus depuis l’été de l’amour.
L’affaire s’avère pourtant hautement plus sérieuse et compliquée. Imagine Our Love, premier album du groupe californien Lavender Diamond, sortira en réalité en Europe au printemps prochain. Derrière cet énigmatique pseudonyme se cache en fait une demoiselle d’une trentaine d’années, Becky Stark.
Après avoir sillonné le pays de l’Oncle Sam avec une troupe d’artistes pour présenter une opérette ("The Birdsongs Of The Bauharoque") inspirée d’un de ses rêves, la jeune femme déménage à Los Angeles pour s’atteler à de nouveaux projets. Rapidement, elle monte une série de duos avec des musiciens issus d’horizons différents : classique, country … Jusqu’au jour où tous se verront rassemblés et unifiés sous la bannière Lavender Diamond.
Pourtant estampillée "new weird America", la musique de Lavender Diamond se positionne définitivement en marge des productions de Devendra Banhart et ses amis. Un côté pop en plus. Les premiers contacts avec Imagine Our Love déconcertent littéralement, la première face tout au moins.
Difficile, de prime abord, de dépasser le stade de comptines un peu naïves sur fond de pop sucrée "I’ll never stop a bullet, but a bullet might stop me, I’ll never drink the ocean, but the ocean might drink me" ("Garden Rose"). Pourtant ces quelques réserves initiales se dissiperont au fur et à mesure des écoutes, ne laissant plus paraître la majesté de ces mélodies rapidement indispensables.
Un virage s’opère ensuite avec la langoureuse "I’ll Never Lie Again" d’inspiration très White Magic. Le reste du disque se boit comme du petit lait : les titres défilant sans la moindre baisse de régime. Mention spéciale à "Like An Arrow" dont la place n’aurait pas été usurpée sur "The Golden Apples Of The Sun" ou encore à "Here Comes Ones", où l’on imagine Becky s’époumonant, devant un parterre de blondinets reprenant le refrain en chœur.
Au-delà des délicats accords de guitare ou de piano, ce disque puise sa réussite dans la voix majestueuse, d’une pureté exceptionnelle de Becky Stark. On pense à Joan Baez évidemment. A Vashti Bunyan aussi parfois. L’occasion de se persuader, s’il était nécessaire, qu’il ne faut jamais se fier aux apparences. |