Anne-Laure P. (basse), Arnaud G. (batterie) et J.P. Montal (guitare
et chant), stéphanois ayant élus domicile à Paris, constituent,
depuis 1997, le groupe français Temper qui émerge
littéralement avec son nouvel album "New
Place New Face" enregistré sous le label Talitres.
Quelques minutes avant leur concert
à la Guinguette Pirate, en première partie de The National,
le trio nous a accordé une interview impromptue en se prêtant avec
bonne humeur et humour au jeu des questions que nous n'avions pas préparées!
Qui est Temper ?
J.P. Montal : Géographiquement, nous venons de Saint Etienne.
On se connaît depuis quinze ans, nous étions à l’école
ensemble et nous avons fait des groupes ensemble. Un d’entre eux était
Boredom qui était un groupe pop dans la mouvance des Pastels, TV Personalities.
Puis nous nous sommes retrouvés à Paris pour des raisons de boulot
et nous avons monté Temper en 1997.
Musicalement nous voulions abandonner la ligne mélodique pop
pour faire du rock brut assez pur, enregistré live si possible, avec
peu d’instruments d’où l’idée du trio pour limiter
les arrangements.
Nous avons enregistré un premier album autoproduit "Snow talking
people" qui a eu quelques critiques sympathiques, puis un second album
également autoproduit "Megaphone chien rouge" qui a eu de bonnes
chroniques dans les fanzines et qui, surtout, a attiré l’attention
de Sean du label Talitres qui nous a contactés. Il a longuement écouté
nos morceaux puis les démos que nous lui avons envoyées. Ça
lui plaisait et il voulait signer un groupe français qui chantait en
anglais pour l’insérer dans son catalogue. D’où l’album
"New face New place".
Cet album a été enregistré pendant 15 jours dans
une grange près de Moulins où nous avions fait venir un ingénieur
du son qui a apporté son matériel d’enregistrement pour
enregistrer toutes les prises en live. Nous ne voulions pas enregistrer dans
un studio. C’est donc un son brut., du live maîtrisé avec
droit à l’erreur. Ce que nous voulions faire, et je ne dis pas
que nous y sommes parvenus, c'était jouer "Exile on mainstreet"
des Rolling Stones comme si c'était Steve Albini qui le produisait.
Donc chez Temper il n’a pas le son album et le son live ?
J.P. Montal : Non c’est globalement assez proche sauf ce soir
puisqu’on utilise la batterie du groupe The National qui n’a pas
le même son que la nôtre. Nous ne sommes pas des bêtes de
tournées. Nous faisons peu de concerts et nous aimons qu’ils soient
changeants avec des parties improvisées. Certaines chansons sont parfois
modifiées dans leur construction mais pas dans le son.
Ces improvisations concernent des chansons qui sont les vôtres et
qui ne figurent pas dans vos albums ?
J.P. Montal : Certains, comme un morceau du premier album "Serpico".
Nous avons rajouté des parties différentes. Nous jouons aussi
des popsongs cadrées qu'on ne modifie pas. Nous sommes tous fans de groupes
comme Television ou le Velvet Underground et on aime bien que parfois le morceau
parte dans des directions différentes.
D’être maintenant sous un label présente-il des avantages
par rapport à votre période d’autoproduction mais aussi
des inconvénients en termes de calendrier de productions ? Avez-vous
gardé vos droits sur votre musique ?
J.P. Montal : Sur ce point tout est très clair avec Talitres.
Nous sommes en coproduction au niveau financier et cela nous a permis de régler
le problème des droits.
Etre chez Talitres est une chance parce que le catalogue est très
bon. Sean connaît parfaitement cette musique et il sait très bien
que nous ne pourront pas lui proposer un mini 4 titres dans deux jours.
Pour le moment il n’y a pas d’inconvénient. Quant
aux avantages, ils sont évidents. Talitres gère tous les problèmes
de logistique, a organisé ce concert et nous a trouvé plusieurs
dates ainsi qu’une session radio sur Radio Aligre dans l'émission
Planète claire. Par ailleurs, nous avons une distribution d’album
que nous n’avons jamais eu ! L’album est facilement trouvable. De
plus, le business rock c’est pas notre rayon et c’est pas à
notre niveau que ça se joue.
Pour le moment vous ne vivez pas encore de votre musique, vous avez tous
un job à côté ?
J.P. Montal : Non, nous travaillons tous…et ça vaut mieux.
Et comment conciliez vous les deux notamment pour les concerts ?
J.P. Montal : Nous nous sommes organisés avec le label pour
lui indiquer des plages pendant lesquelles nous pouvions être disponibles.
Arnaud G. : D’ailleurs je ne pense pas que si nous prenions le
risque de ne pas bosser pendant six mois ou un an que cela nous permettrait
de vivre de notre musique sans en changer le cadre actuel. Nos jobs permettent
d’assurer notre part de financement et de préserver la coproduction
à laquelle nous sommes attachés.Cela nous permet aussi de ne pas
tergiverser ni de faire de compromis, par exemple en acceptant de faire quelques
titres en français, si on fait ou non un autre album. C’est binaire
: c’est oui ou non.
J.P. Montal : Cela est très clair avec Sean.
Pourquoi l’anglais ?
J.P. Montal : C’est un choix parce tous les trois nous écoutons
99% de chansons en anglais. Mais il y a une chose qui est apparue plus récemment
il y a deux ou trois ans. en ce qui concerne mon écriture.
Au début, je soignais moyennement les textes parce je misais
sur une certaine liberté d’écriture dans les textes parce
que les gens ne sont pas forcément bilingues. Or, les passionnés
de musique écoutent les textes et déchiffrent bien l’anglais,
surtout si l’album est diffusé à l’étranger.
Donc depuis trois ans, je peaufine vraiment les textes et Anne Laure les relit
pour traquer les erreurs. Sincèrement, je pense avoir travailler autant
sur les textes que sur la musique pour le nouvel album.
Justement comment se passe l’écriture et la composition d’un
morceau ?
J.P. Montal : Toujours la musique en premier. J’écris
une base musicale que nous jouons ensemble et qui donc évolue. Anne Laure
écrit la ligne de basse et les arrangements. Nous jouons et modifions
au fur et à mesure la structure du morceau. Simultanément, deux
ou trois phrases de refrain émergent et je construits le texte, qui lui
aussi évolue tout le temps. Par exemple ce soir nous allons jouer un
morceau dont le texte n'est pas encore définitif, même si c'est
sans doute pas loin du compte.
Et l’écriture du texte se fait directement en anglais ?
J.P. Montal : Oui.
L’anglais est très fédérateur parce qu’il
est facilement exportable mais n’est-ce pas un handicap pour la diffusion
sur les ondes françaises en raison des quotas ?
Arnaud G. : Nous on s’en fout on bosse ! (rires)
J.P. Montal : C’est vrai mais nous n’avons pas d’état
d’âme parce que l’écriture en anglais s’est imposée
comme une évidence pour nous.
Anne Laure P. :Oui nous avons toujours chanté en anglais, d’abord
en yaourt puis en anglais. Avec nos premiers groupes, nous ne faisions pas des
reprises de Téléphone par exemple.
Arnaud G. : Ce qui n’empêche pas J.P. d’avoir des
idées de chansons en français sur autre chose, mais il est vrai
que nous ne les jouerons pas avec Temper. De toute façon ça ne
collerait pas avec le son de Temper.
J.P. Montal : J’aime les textes de Gainsbourg et j’ai toujours
été impressionné par ceux de Trust notamment.
En parlant de Saint Etienne, Mickey 3 D ça vous dit quelque chose
?
Anne Laure P. : Non pas tellement.
J.P. Montal : Moi, je n’aime pas ce qu’ils font mais en
revanche ….
Anne Laure P. : …chapeau bas (rires).
J.P. Montal : De toute façon le pop rock pour le faire dans
la tradition newyorkaise s’accommoderait mal du français. Il y
avait un groupe français que j’adorais, de Lyon justement, les
Ramblers, qui disait : on fait du rock on chante en anglais, on aurait fait
du flamenco on aurait chanté en espagnol.
Vous disiez que vous écoutiez beaucoup de musique anglo-saxonne.
Quels sont vos groupes cultes qu’il s’agisse de groupes que vous
aimez ou de groupes qui peuvent vous influencer ?
J.P. Montal : Nous avons tous les trois une base commune constituée
d’une part du rock’n roll des sixties et début seventies.
Nous sommes des fans assez inconditionnels des Who, des Kinks, des Birds aussi
sous certains aspects et bien sur le Velvet Underground. D’autre part,
le rock indépendant américain des années 90 après
le grunge. C’est Pavement,...
Anne Laure P : ..Silkworm, Shellac (groupe de Albini), Frank Black
en solo
J.P. Montal : Les Pixies après chacun a sa petite obsession.
Pour moi celle qui ne me lâche pas c’est les Rolling Stones même
les Rolling Stones d’aujourd’hui un peu…décrépis
Anne Laure P. :Moi c’est la période Motown J’adore
la musique noire américaine des années 60-70 même si mon
jeu en est très éloigné.
A cause de la basse peut être ?
Anne Laure P. : Non, non c’est bien antérieur à
cela.
Arnaud G : J’aime bien le groupe Crazy Horse qui joue derrière
Neil Young ou le batteur de Led Zeppelin parce que je n’ai pas trop de
facilités en musique et quand je les écoute ça me cale
et me motive ou me démotive selon les jours…(rires)
Vous avez une formation musicale ?
J.P. Montal : Non. Nous jouons à l’oreille.
Arnaud G. : Je sais lire la rythmique et je pourrais même l’écrire…
si je n’avais que cela à faire et si c’était utile…
Et cela ne pose pas de difficulté pour écrire les morceaux
?
J.P. Montal : Non, on enregistre et je garde les accords et avec Anne
Laure on se cale là dessus mais nous n’écrivons rien.
Arnaud G : Pour ce qui concerne la batterie ça prend le temps
que ça me prends, même au milieu des répétitions,
pour arriver à sortir la ligne de basse et à comprendre le morceau.
C’est totalement empirique, c'est à force de passages. Mais en
général les lignes du début reviennent et se dégagent
facilement.
Arnaud G : Par exemple pour un morceau ancien "Life style"
, J.P. a trouvé une nouvelle façon de la mettre en place et on
n’a de nouveau du plaisir à le jouer comme s’il s’agissait
d’un nouveau morceau bien que les mélodies et les paroles sont
identiques.
J.P. Montal : De même les morceaux sont enregistrés de
la manière où ils se présentent à ce moment là.
Ils peuvent ensuite évoluer. Il est vrai que pour notre denier album
New Place New Face on voulait les caler. Pour les anciens morceaux, c’est
un peu différent.
L’influence de Lou Reed est d’ailleurs très prégnante
dans cet album notamment dans le morceau qui a le même titre. C’est
volontaire ou une simple coïncidence ?
Anne Laure P. : Il est tombé dedans quand il était petit…
J.P. Montal : C’est clair car Lou Reed est un de mes plus grands
chocs musicaux quand ma grande sœur qui est de dix ans mon aînée
m’a offert le coffret des Velvet et l’album Berlin. J’ avais
onze ans je crois et ça ma mis sur le cul. Mais je n’y pense pas
quand je joue et il y a peut être une influence inconsciente mais j’assume.
Anne Laure P. : C’est un peu injuste de dire cela parce que c’est
vrai que la voix fait un peu penser à Lou Reed mais les morceaux sont
très différents.
J.P. Montal : Cela étant il y a pire comme influence.
Question banale : pourquoi avoir choisi Temper ? Le choix d’un nom
n’est jamais neutre et il va vous suivre, longtemps nous l’espérons.
Et puis il a été également choisi par un groupe de dub
électro.
J.P. Montal : Trouver un nom c’est la croix et la bannière.
Ce qui me plait dans le nom c’est ce qu’il véhicule deux
choses. D’une part, l’expression "loose my temper" perdre
son sang froid et temper veut également dire caractère, force
de caractère.
Ce qui m’intéresse c’est que ce groupe ait du caractère
et que les gens qui viennent nous voir, même s’ils ne sont pas emballés
par notre musique, reconnaissent néanmoins que ce groupe avait du caractère.
C’était un nom provisoire au début et puis il a
perduré. D’ailleurs les noms de groupes…quand je pense qu’un
de mes groupes préférés Pavement signifie trottoir…Cela
étant je ne suis pas très intéressé par les noms
incroyablement drôles.
Anne Laure P. : Comme electric merguez
Arnaud G. : ou les blaireaux de ravel
Vous disiez que vous ne tourniez pas beaucoup. Avez vous déjà
donné des concerts à l’étranger ?
J.P. Montal : Non mais il y a quelques perspectives pour une tournée
en Allemagne.
Vos albums sont distribués à l’étranger ?
J.P. Montal : Oui par le biais de Talitres on peut trouver notre album
en Allemagne (Zomba), en Italie, au Portugal et en Espagne. Nous avons eu de
bonnes critiques en Allemagne.
Anne Laure P. : Nous serons d’ailleurs sur une compil avec d’autres
groupes français comme Noir Désir .
J.P. Montal : Il s’agit d’une compil qui sortira dans un
magazine allemand consacré au rock français Music express qui
est l’équivalent de rolk and folk. Il y aura également Benjamin
Biolay, Dyonisos peut être et Temper avec la chanson "September".
September a un rapport avec les événement du 11 septembre
?
J.P. Montal : Non pas du tout c’est plus personnel et saisonnier
parce que je retrouve toujours la pêche en septembre. surement un truc
d'enfance (rires).
Avez vous des chansons en stock pour un prochain album ?
J.P. Montal : On a 7- 8 chansons en stock qui mûrissent plus
d’autres plus anciennes qui n’ont jamais été enregistrées
mais pas de date. Nous avons de quoi faire un album mais pas de timing. Notre
dernier album est sorti en mai 2003 et il faut voir comment il va évoluer.
Avez vous des projets solo ou jouez-vous dans d’autres groupes ?
Anne Laure P. : Je chante dans un groupe qui s’appelle Left et
qui a sorti un album autoproduit, guitare basse batterie. Nous faisons de petits
concerts guitare/voix sans grande prétention pour le moment .
J.P. Montal : J’ai écouté l’album c’est
de la pop hyper mélodique qui fait penser à Elliot Smith.
Où peut-on trouver l’album ?
Anne Laure P : On peut le trouver dans mon salon sinon... sinon utilisez
le mail lefttheband@hotmail.com.
Arnaud G. : Non moi rien, mais 2 groupes en 3 personnes c'est dejà
pas mal, faut un peu laisser souffler la population. (rires)
Ce soir c 'est votre premier véritable concert parisien ?
J.P. Montal : Oui le premier de l'époque Talitres, dans de bonnes
conditions, mais on a joué beaucoup dans les bars etc..
Arnaud G. : Oui ce soir c'est une des premières ou on sera pas
emmerdé par la police !
Si vous deviez résumer votre musique en trois mots, lesquels choisiriez-vous
?
Arnaud G : On a droit à 1 mot chacun ou 9 mots ?
Anne Laure P. : Tripal ...qui vient des tripes donc
J.P. Montal : Rock ... à une epoque ou les groupes se disent
rock indé, punk fusion ou je ne sais quoi, nous c'est du rock.
Arnaud G. : Déséquilibre… dans le bon sens du terme.
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