Fons luminis : Codex Las Huelgas
(Evidence) juin 2018
In manus tuas domine commendo spiritum (dans tes mains seigneurs, je remets mon esprit).
Chut. Imaginez le silence. Imaginez-vous dans un superbe cloître roman aux fines colonnes géminées, celui du monastère Santa Maria la Real de Las Huelgas proche de Burgos en Espagne. Monastère cistercien féminin fondé à la fin du XIIème siècle par Alphonse VIII de Castille et son épouse Aliénor Plantagenêt et rapidement haut lieu monastique du royaume de Castille et Léon. Et puis écouter la musique qui vient du chœur de l’église, une musique pleine de couleurs invitant à la spiritualité, au recueillement. Goûtez, savourez ce moment.
Cette musique, c’est celle du manuscrit connu sous le nom de "Codex Las Huelgas" datant de 1340 et réunissant 186 chants liturgiques et paraliturgiques. L’interprétation qu’en donne l’Ensemble Gilles Binchois emmené par Dominique Vellard est absolument superbe. Mais comment en aurait-il pu être autrement avec cet ensemble, référence dans le domaine de la musique médiévale et de la Renaissance ?
Il y a ici une quête de vérité, d’aller au plus près de l’histoire de cette musique (via les traités, l’étude qu’en a fait Wulf Arlt, par l’analyse du manuscrit), d’être dans une interprétation la plus fine, la plus correcte possible. Tout sonne juste, chaque conduit, la moindre intensité vocale, le plus petit choix rythmique (aidés par les annotations des modulations rythmiques et non métriques des scribes sur le manuscrit), dans chaque hoquet ou muance. Et puis la prise de son donne toute sa clarté, toute son intensité à cette interprétation. Comment ne pas être pris au cœur, à la chair ? Comment ne pas se laisser bouleverser par cette musique qui appelle à l’introspection, à la méditation, à la plénitude et à la piété ? Et se retrouver seul, dans son propre silence, en étant croyant ou pas, et se laisser guider par cette lumière, cette musique et cette magnifique interprétation.
Avec la mort de Lynch, c'est un pan entier de la pop culture qui disparait, comme ça, sans crier gare. Il reste de toute façon sa discographie qui n'a pas attendu sa mort pour être essentielle. Pour le reste, voici le sommaire. Retrouvez-nous aussi sur nos réseaux sociaux !