Du plus petit au plus grand passionné d’Histoire, chacun a un jour été intrigué par la fameuse "affaire des poisons" de la cour de Louis XIV, THE roi Soleil. Celui-là même qui rassemblait sa cour à Versailles, histoire de les avoir à l’œil, mais il n’avait pas pensé que le splendide édifice (tape-à-l’œil aussi) serait une scène de Cluedo digne des plus célèbres huis clos d'Agatha Christie : tout le monde veut sa place auprès du Magnifique, et les poisons sont un bon moyen d’y parvenir.
Karin Hann, membre du jury du Grand Prix du Roman Historique (et titulaire de bien d’autres fonctions dont l’énumération serait longue et fastidieuse) s’est à son tour penchée sur la question dans Les Venins de la Cour. Son premier roman est Althéa ou la colère d’un roi, celui-ci est la suite. Mais heureusement pour nous, ils sont dissociables. C’est un peu comme dans un épisode des Experts, vous pouvez les regarder dans le désordre sans que cela nuise à la compréhension de l’épisode. Idem ici.
Les Venins de la Cour reprennent le personnage d’Althéa (fille adoptive de Nicolas Fouquet, déchu après les sommets de la gloire dans Althéa ou la colère d’un roi), qui est cette fois la maman d’Eloïse, jeune jouvencelle rêvant de faire son entrée dans la Cour de Louis XIV. Il lui faut pour cela un titre de duchesse (minimum, pour avoir le droit de s’asseoir en présence de la reine), qu’elle aura en convaincant son père d’accepter son union avec le Comte de Vermonfort (qui aura le titre de duc de papa à sa mort).
Oui mais, vous le savez aussi, si ça se passait comme elle l’avait prévu, son histoire n’aurait jamais fait l’objet d’un roman. La suite est moins rose pour Eloïse, qui va de désillusions en humiliations. Non, n’insistez pas, je ne vous en dirais pas plus, il faudra lire le livre pour le savoir. Je peux seulement vous dire que cette fragile donzelle se retrouve prise dans la tourmente de "l’affaire des poisons", et emprisonnée par l’implacable Nicolas de la Reynie (qui mettait tout le monde aux fers, quel flair !). Y échappera-t-elle ? Je vous dirais simplement que tout est bien qui finit bien.
L’avant-propos a un peu refroidi mes ardeurs à plonger tête baissée dans le roman, il parle de la quantité de documents relatifs à l’affaire des poisons retrouvée, malgré les efforts de Louis XIV pour les faire disparaître. L’avant-propos met en avant l’exactitude des éléments descriptifs. J’ai cru à une suite de schémas et de détails très précis. Et puis non, pas du tout, le décor est bien fidèle à la réalité historique, mais heureusement que l’intrigue est portée autour des relations interpersonnelles, et non autour des plantations et de l’alignement des pavés dans les ruelles.
Les personnages, même les plus mauvais, sont attachants d’humanité. Eloïse par sa naïveté mise à mal, ses parents par leur inquiétude protectrice, son mari par sa fragilité derrière sa méchanceté, le roi par son orgueil démesuré (ça non plus, ce n’est pas un scoop), ses maîtresses par leur adoration et leurs dents bien aiguisées qui rayent le plancher des jardins… Et même le chef de la police Nicolas de la Reynie a ses bons côtés.
L’histoire d’Eloïse est fictive, l’avantage d’inventer ce type de personnage mêlé aux grands noms de l’Histoire, c’est qu’on peut quasiment tous les évoquer, sans prendre le risque de commettre de bévue sur leurs pensées, les seules paroles prononcées sont tirées de témoignages historiques.
Un bon roman, un bon moment, sans entrer dans les descriptions des procès, mais plutôt attaché aux personnes de l’époque, aux entraves des protocoles et des titres, et aux intrigues qui en découlent naturellement. |