Pour son septième album, The Laughing Stalk, Wovenhand (formerly known as "Woven Hand") se voit confronté à la nécessité de combler le départ de Pascal Humbert, bassiste revenu en 2008 d'entre les morts de 16 Horsepower et reparti récemment s'occuper en Gironde du vignoble familial (et, accessoirement, écrire et enregistrer avec Bertrand Cantat les chœurs du spectacle Des femmes de Wajdi Mouawad, mise en musique de textes de Sophocle publiée depuis sous forme d'album sous le nom de Chœurs). Pari réussi pour le groupe de David Eugene Edwards, qui semble se rire de ces petites vicissitudes mortelles.
L'album est certes moins planant que ses prédécesseurs, ne louche plus du côté du psychédélisme, du vaudou, du new age – de tout ce qui peut amener la transe. Il est plus heavy, au sens propre du terme : il déploie un son lourd, qui travaillerait dans l'épaisseur plutôt que dans la profondeur. Exemplaire est à ce titre "Long horn", le beau titre d'ouverture, avec sa petite touche surf rock, mais noyée dans la saturation. On songe, pourquoi pas, au dernier Black Angels (Phosphene Dreams ; entendre par exemple le morceau "Telephone"). Ce n'est pas encore les Warlocks ou le Brian Jonestown Massacre, mais on sent la tentation de la densité.
Capturé live, le son est également souvent lointain, écrasé, coulant... loin, au total, des habituelles impeccables productions élégantes de la formation. Est-ce parce qu'il a été mixé par Alexander Hacke (a.k.a Alexander Von Borsig, ancien membre et aujourd'hui directeur artistique d'Einstürzende Neubauten) ? Est-ce l'effet sur disque de la nouvelle posture scénique de David Eugene Edwards, qui semble avoir abandonné la station assise ?
Le résultat est clair en tout cas : The Laughing Stalk sonne moins évidemment mystique que ses prédécesseurs, Edwards y perd un peu de sa stature d'imprécateur, de prêcheur de rue habité (quoique l'oreille attentive puisse encore y entendre un "hallelujah !" de temps en temps).
Pour le reste, The Laughing Stalk reste clairement un album de Wovenhand, immédiatement identifiable et tout à fait délicieux. Mais le scandale, s'il en fallait un, serait peut-être celui-là, plutôt que celui de l'infidélité faite à soi-même, que les plus fanatiques ne manqueront pas de reprocher à ce nouveau son : cet album est un septième, déjà, et l'on pourrait presque être déçu qu'il ne soit pas plus différent des six précédents – aussi excellent cela soit-il. |