Spectacle de fin d'études de la 22ème promotion des étudiants du Centre national des arts du cirque de Châlons-en-Champagne, mise en scène de Stéphane Ricordel, avec Edward Aleman, Fanny Alvarez, Fanny Austry, Birta Benonysdottir, Mathieu Bleton, Léo Blois, Sarah Cosset, Julien Cramillet, Antoine Guillaume, Romain Guiniot, Mathieu Hedan, Marion Hergas, Fanny Hugo, Wilmer Marquez, Karim Messaoudi, Marius Ollagnier, Océane Pelpel, Maxime Reydel et Juan Pablo Palacios.
En 2011, on constate, navré, que l'énoncé "je vais voir du cirque" fait encore remonter des souvenirs de sinistres clowns sous antidépresseurs, d'odeurs d'animaux, de paillettes et de fanfares à pouet pouet.
Le spectacle de la 22ème promotion du Centre National des Arts du Cirque, débarrassé de ce kitsch agressif, départi d'un culte sportif de la prouesse, du record et de la performance, déploie un art qui mêle intelligence, adresse, folie et élégance.
Si le dispositif scénique ne suscite pas l'étonnement - chapiteau, public à 360° autour de la scène et agrès traditionnels du cirque, la palette des émotions que l'on ressent devant les différents tableaux surprend, manifestement. Passant de la tension à l'émerveillement enfantin, du saisissement à l'admiration, le public suit, médusé, poussant des oh et des ah, la jeune troupe du CNAC : entre les acrobates et les équilibristes, se glissent une funambule à talons, magistrale, implacable et un danseur en ski à la fois lunaire et absurde, jouant sur le ralenti des mouvements à la façon d'une chorégraphie hip-hop.
Ce cirque contemporain signe la rencontre des arts, injecte la chorégraphie et l'acrobatie dans une longue et irrésistible variation. Dès les premières minutes, Fanny Austry donne le ton d'un spectacle qui ne faiblit pas. Alors qu'elle est à la corde volante, une vidéo de son visage est projetée, donnant à voir une beauté préraphaélite, associant à l'admiration naïve un trouble sentiment esthétique.
La musique, évoluant entre violoncelles et trip hop, accompagne la rencontre de la danse, de la capoeira, des agrès - traditionnels et novateurs - et de la vidéo. "âm" intègre les incontournables - mât chinois, corde - et les revisite. L'installation des agrès se fait spectacle et évite l'écueil des temps morts, ou pire, mal meublés. L'essentiel du spectacle s'articule néanmoins autour d'une large plateforme en bascule, successivement mur, plan incliné, balance instable, zone à conquérir et seuil de la piste, elle est un agrès, une allégorie, l'espace autour duquel s'organise le spectacle.
Stéphane Ricordel, ancien membre des Arts sauts, propose ici une mise en piste qui donne à voir des artistes pris dans un bouillonnement, une intensité collective galvanisante et réjouissante.