L’enseignement de l’Histoire en France néglige trop souvent la période napoléonienne. Certes nous avons tous des bribes de souvenirs sur Napoléon, comme un sacre, un code civil toujours en application et une mort en exil – que certains trouvent douteuse – sur une île nommée Sainte-Hélène. Puis il y a bien aussi une histoire de campagnes  en Egypte et en Russie.

Alors bien sûr, toute information supplémentaire sur ce personnage charnière entre nos  XVIIIème  et  XIXème siècles est bienvenue et salutaire, surtout si elle est bien documentée et rédigée par un auteur dont l’expérience de la narration historique n’est plus à démontrer.

Haut fonctionnaire soviétique, diplomate, Vladimir Fédorovski s’est installé en France après l’effondrement de l’URSS, pour se consacrer à l’écriture d’ouvrages sur son pays, ouvrages rédigés en français mais qui, forts d’un succès mondial, sont traduits dans près d’une trentaine de langues.

Dans son dernier opus, Napoléon et Alexandre, Le rêve au sommet, il met son talent non seulement au service de deux grandes figures de l’Histoire, l’une de son pays natal, l’autre de son pays d’adoption, mais il s’inscrit également dans la continuité en mettant ses pas dans ceux de Léon Tolstoï – dont le centenaire de la mort sera célébré en novembre prochain – qui avait fait des deux souverains les personnages de son œuvre majeure Guerre et paix.

Vladimir Fédorovski fait ainsi se rejoindre ses passions et sans délaisser son goût du détail et de la "petite histoire", il opte résolument pour une vision moderne de l’Histoire, tournée vers les relations internationales.

Et c’est là que réside tout le talent de Vladimir Fédorovski. Il sait nous entrainer à la fois sur le champ de bataille, ses horreurs, ses vicissitudes quotidiennes de ravitaillement – les convois de victuailles qui ne suivent pas la troupe – et dans le même temps nous introduire dans la tente de Napoléon et le palais d’Alexandre, où nous assistons aux atermoiements, aux questionnements, aux incompréhensions des décideurs.

Plus qu’une histoire de la guerre, c’est la démonstration de deux visions politiques qui s’opposent, de deux mondes en changement qui se défient, et finalement de deux hommes et leur mode de pensée respectif qui s’affrontent.

En replaçant Napoléon et Alexandre dans le contexte de politique de l’époque, l’auteur nous montre les prémisses de l’Europe telle que nous la connaissons aujourd’hui, avec encore et toujours l’incapacité de part et d’autre de vraiment comprendre son voisin.