Monologue de Carlotta Clerici, mise en scène par Nadine Trintignant, avec Catherine Marchal.
"Ce soir j'ovule", titre explicite pour ce seul en scène écrit par Carlotta Clerici, qui traite du désir irrépressible d'enfant qui, à défaut de pouvoir se concrétiser naturellement, conduit à recourir à la science médicale.
Telle est la situation de Clara, qui presque subitement, après une vie sentimentale de femme dite "libérée", une quadra, stabilisée dans un couple qui semble tenir la route et décillant les yeux sur les aiguilles de son horloge biologique qui va bientôt va sonner le glas, est prise d'un désir irrépressible d'enfant certes au départ pour concrétiser son union conjugale, puis comme une quête de sens à sa vie afin de ne pas rester "une terre stérile".
L'intéressant, dans la manière dans laquelle Carlotta Clerici aborde cette narration individuelle mais également archétypale, ne réside pas tant dans l'aspect presque anecdotique du parcours du combattant qu'implique ce besoin de grossesse qui se déroule avec une implication souvent passive voire marginale de l'homme, et qui fait bien évidemment vibrer la corde émotionnelle, que dans les deux paradoxes qu'elle révèle.
D'une part, la pression contradictoire que la société fait peser sur la science médicale qui au nom de la liberté individuelle et du confort personnel doit simultanément annihiler un processus biologique et suppléer à sa défaillance. Et, d'autre part, le fait que certaines femmes qui bénéficient de la libération de la femme si durement acquise et dont les corollaires sont notamment la liberté sexuelle et de ne plus être tributaire de la contrainte aliénante de la maternité, demeurent inféodées non seulement au regard des autres, dont celui compatissant voire réprobateur des proches, mais également à cette vieille lune existentielle qu'est la réalisation de soi par la transmission de la vie.
Le sujet est traité avec juste ce qu'il faut d'humour, un humour parfois un peu jaune pour essayer de prendre du recul par rapport à l'échec toujours possible, et aux doutes et découragement qui succèdent à la détermination et à l'enthousiasme.
Sous la direction de Nadine Trintignant, dont est connue l'implication dans les luttes féministes, dans un décor blanc clinique, un salon épuré avec mur de faïence et fauteuil à étriers amovible, Catherine Marchal réussit un sans faute dans ce seul en scène qui repose sur l'interprétation sensible.