Baskerville !

D’abord un nom, celui d’une malédiction. Ensuite, (en hommage naturellement) celui de frère Guillaume de Baskerville, ce moine enquêteur du roman d’Uberto Eco "Au nom de la rose", enfin (pour l’instant) une étude qui est devenue un bouquin. Un spécialiste du genre d’ailleurs un chasseur de l’impossible, Pierre Bayard qui déjà s’était illustré dans la résolution du problème concernant "Le meurtre de Roger Ackroyd" d’Agatha Christie. Il ne pouvait pas en être autrement que de s’attaquer au roman peut-être le plus connu de Conan Doyle.

Édité en 1901 et 1902 dans le Strand Magazine, l’aventure se situe avant le décès présumé d’Holmes. Avant que Conan Doyle prenne la décision d’abandonner dans un épisode définitif son héros. Il n’en sera rien naturellement puisqu’il reprendra quelques années plus tard sa plume pour le faire renaître.

"Le chien des Baskerville" fait partie des quatre romans de Conan Doyle ayant Holmes comme héros. Les nouvelles sont au nombre de 56. Ce roman est aussi le plus connu, le plus lu et celui qui a été adapté 24 fois au cinéma. Alors… Alors.

Et bien le mystère reste entier ! Grâce à ce fouineur de Pierre Bayard qui, muni des indispensables outils de détective, prouva que Sherlock Holmes s’était trompé de coupable.

Voilà une chose étrange que nous enseigne cette mise à plat du roman, les personnages de fictions vivent leurs propres vies, c'est-à-dire qu’ils deviennent indépendants de la création. Plus que l’enquête de Pierre Bayard, son travail nous mène aux frontières de l’irrationnel. A partir d’une analyse comportant trois volets : a) Révéler les erreurs et les invraisemblances du récit, b) Affirmer l’autonomie des personnages par rapport à Conan Doyle, c) Constater la culpabilité.

Il faut donc, à partir de ces éléments relire le roman d’une façon transversale sans s’occuper de la narration.

Mais une œuvre de fiction n’a que faire de la vraisemblance. l’autonomie des personnages est plus intéressante, par cette recherche on arrivera à découvrir les absences, les actes secrets de chaque personnage et surtout la présence réelle ou imaginaire du Chien des Baskerville ? Car si on nous parle bien du/de chien, qui a vu cet animal énorme, phosphorescent, mais qui ne laisse aucune trace dans la lande ? Le chien n’est pas celui que l’on croit ! En tout cas pas celui décrit dans le roman et que l’on ne voit jamais… L’entendre oui.

Si chaque personne est autopsiée c’est pour mieux en comprendre le fonctionnement psychologique. Pierre Bayard les ausculte, les uns après les autres avec autant de minutie qu’un Maigret. Il n’y a pas de second rôle. Tous ont l’importance de leur personnage et parmi eux Sherlock Holmes. Je laisse naturellement l’auteur à sa réflexion. Elle est loin d’être dénuée d’intérêt. Offrant au lecteur une autre approche du roman qu’il s’empressera d’interpréter, quitte a ouvrir une nouvelle fois le livre.

Au fond nous le voyons Pierre Bayard nous pose une autre question à travers son exercice de style : quelle vérité pour le roman ! Démontrer s’il en est que l’auteur une fois le manuscrit chez l’imprimeur, n’est plus maître de son histoire et de ses personnages. Qu’un roman a autant de vie qu’il a de lecteur.