Agnès Debord est à l'affiche du Petit Gymnase avec son 3ème spectacle "Dans l'air", un spectacle qui mêle chansons d'hier et d'aujourd'hui, chansons et comédie, un spectacle pétillant comme son interprète.

Et Agnès Debord est à la ville comme à la scène et vice versa. Elle est fraîche, jolie, pétillante et nature. Une jolie plante et une belle nature extrêmement sympathique, disponible, qui a son franc parler et une bonne humeur communicative.


Vous avez commencé par la danse puis ce fût la comédie et maintenant vous êtes plutôt chanteuse. Comment tout cela s'est-il enchaîné pour arriver à ce spectacle particulier qu'est "Dans l'air" actuellement à l'affiche du Petit Gymnase qui nous donne l'occasion de vous rencontrer ?

Agnès Debord : Ce spectacle est un spectacle théâtral musical. C'est de la chanson mise en scène parce que je viens du théâtre. Je suis toujours comédienne et je suis ouverte aux éventuelles propositions. Mais il se trouve que depuis que je monte mes propres spectacles je n'ai plus envie de faire que cela parce que j'y trouve mon compte aussi bien dans la chanson que dans le théâtre. Chaque chanson est véhiculée par un personnage qui est mis en scène par Laurent Fraunié qui est un metteur en scène de théâtre. Nous travaillons donc de la même manière qu'au théâtre même si le support est la musique.

Quant à l'enchaînement il n'y a pas vraiment de logique encore que sans doute ne me proposait-on pas les rôles qui pourraient me convenir. Et surtout je ne voulais plus passer mon temps à attendre que mon téléphone sonne car je trouvais cela horrible. J'en étais arrivée à un point d'angoisse tel, avec le spectre du comédien au chômage, que je me suis dit que je devais me prendre en main. J'ai toujours aimé chanter et j'ai toujours chanté en cours de théâtre. Et je me suis lancée, et ce à la suite d'un chagrin d'amour d'ailleurs. Pour m'occuper la tête tellement j'étais triste j'ai suivi un stage de chant dirigé par Richard Croce qui est maintenant à la Star Académy maintenant et qui est un très grand professeur de chant. Il m'a aidé à mettre le doigt sur la chanson que j'aimais c'est-à-dire la chanson à texte.

C'était il y a 10 ans déjà et j'ai ainsi monté mon premier spectacle. J'ai commencé dans les cafés mais peu de temps car j'ai eu la chance de pouvoir jouer au Théâtre Mouffetard assez vite. Et à partir de ce moment je n'ai pas arrêté. Mon premier spectacle voix-accordéon s'appelait "L'amour vache". Ensuite ce fut "L'amour toujours" avec piano-voix. Et maintenant c'est "Dans l'air" avec piano-batterie-voix.

Je constate que bien que sortant d'un chagrin d'amour vous y croyez toujours mais que le mot amour a disparu du titre.

Agnès Debord : J'y crois complètement ! Et "Dans l'air" il en est toujours question. Je souhaitais bien sûr mettre le mot amour dans le titre mais je me suis rendue compte avec le second spectacle que la présence de ce mot était source de confusion car le public se méprenait et pensait qu'il s’agissait du même spectacle alors qu'il s'agissait réellement de deux spectacles complètement différents avec des répertoires totalement différents.

Justement, puisque vous abordez ce point… on constate en ce moment un engouement certain du public pour les répertoires rétro, je ne citerai par exemple que le trio Lucienne et les garçons. Vous vous situez également dans ce registre. D'où cela vient-il ?

Agnès Debord : Il s'agit d'un répertoire que j'affectionne depuis longtemps et je connais bien les chansons de Fréhel, Marie Dubas, Arletty. Et il est vrai qu'il y a un engouement du public et pas beaucoup des institutions. Nos spectacles ne sont pas aidés car la priorité est accordée aux auteurs-compositeurs-interprètes. Dire que l’on est auteur-compositeur-interprète agit comme une sorte de sésame pour l'obtention de subventions. Mais le public est le seul qui a raison parce que c'est lui qui vient vous voir, qui paie sa place et qui nous suit. Je lui en sais gré car depuis que je chante j'ai un petit public qui me suit et qui grossit à chaque spectacle. C'est grâce à lui que je tiens.

Et cet engouement tient au fait que ce sont nos racines communes, notre culture, nos références même si on n'en a pas conscience. C'est très franco-français et je ne dis pas cela dans un sens chauvin. Et il n'y a qu'à voir le battage médiatique avec le film qui sort sur Edith Piaf même si moi je n'aime pas trop Edith Piaf. J'aime les titres moins connus d'elle. Mais elle a été victime de son succès dans le registre du mélo alors qu'elle aurait sans doute voulu faire autre chose. Elle avait vu de très nombreuses fois sur scène Marie Dubas dont elle disait qu'elle lui devait tout et qui était une femme extravagante, tout son contraire.

Les gens aiment bien également la proximité avec les artistes qu'il y avait dans les spectacles de cabaret des années 50. C'est la raison pour laquelle je me rapproche du public, que je descends dans la salle pour lui parler bien sur sans les déranger les gens ou les mettre mal à l'aise. Et leurs réactions sont étonnantes. J'aimerai qu'ils aient envie d'être copain avec moi, qu'un lien se crée entre nous. Pour ne pas être seul car c'est aussi ça le spectacle et la musique.

Donc un répertoire que vous appréciez mais aussi une petite novation par rapport aux deux spectacles précédents. Vous avez pris la plume pour écrire quelques chansons que vous avez insérées dans ce répertoire.

Agnès Debord : Oui, il y en a 4. Daniel Glet, qui m'accompagne au piano dans le spectacle et qui en a fait tous les arrangements, a mis en musique "Plic, plic, floc, floc et tcha-tcha-tcha" un titre saugrenu mais que j'aime bien qui parle du temps qui passe et du vieillissement et "Les bonnes résolutions" qu'il ne faut pas suivre. "Dédicace" et "Amour naissant" ont été mis en musique par Jérôme Suzat-Plessy qui vient du rock il était le bassiste de No one is innocent.

C'est effectivement nouveau pour moi et je les ai mis dans le spectacle vraiment au compte gouttes car j'avais très peur. Il est difficile d'avoir confiance dans ses propres textes. Cela étant je n'en suis pas encore à monter tout un répertoire de créations. Et puis j'aime tellement les chansons des autres que le mélange perdurera sans doute.

Comment se monte un tel projet compte tenu de la frilosité des institutionnels ?

Agnès Debord : Je le monte parce que c'est ma vie et qu'on ne l'empêchera jamais de monter un spectacle. Parce que je connais des super musiciens, mon metteur en scène que je connais depuis les bancs du théâtre. Nous sommes un petit groupe d'artistes très soudés que rien n'empêchera de travailler. Cela étant pour ce spectacle j'ai bénéficié d'une résidence payée par le théâtre de Rezé à Nantes ce qui nous a aidé. Et j'ai souvent bénéficié de beaux petits coups de pouce comme ça notamment de salles en province qui me font confiance par rapport aux spectacles précédents.

Bon il y a la question de Paris qui est le point le plus dur car la plupart des théâtres louent la salle ou font un truc hypocrite la co-réalisation avec un minimum garanti ce qui est de la location de salle déguisée. Donc ce n'est pas facile mais au Petit Gymnase j'ai négocié une vraie coréalisation 50/50 des recettes avec un bilan au bout de 5-6 représentations.

Vous ne jouez qu’une fois par semaine, le lundi à 19 heures.

Agnès Debord : Oui, cela résulte d'un choix car je ne bénéficie pas de gros moyens promotionnels même si j'ai une attachée de presse géniale mais je n’ai pas de production derrière pour payer les colonnes Morice. Cette unicité de représentation me paraît permettre au bouche à oreille de fonctionner. Cela étant le but est de jouer en série bien sûr.

En l'occurrence pour le moment cette formule nous convient d'autant que le pianiste est directeur musical et pianiste du spectacle "Cabaret" à l’affiche des Folies Bergère donc il ne peut être disponible que son jour de relâche. Cela nous permet de nous inscrire dans le temps et donc de pouvoir toucher les professionnels.

A priori cette programmation dure combien de temps ?

Agnès Debord : Jusqu'à fin juin.

Avez-vous d'ores et déjà d’autres projets ?

Agnès Debord : Je suis une usine à gaz dans la tête et je pense toujours à d’autres choses. Je pense à ce spectacle mais aussi aux précédents qui tournent toujours. Je pense aussi au futur. J'aimerai écrire davantage. J'écris toujours mais quand on ne compose pas on est un peu tributaire des disponibilités des musiciens. Je pense néanmoins à une résidence pour un prochain spectacle qui sera peut être plus axé sur mes propres textes. Mais je n'abandonnerai pas les reprises ! Car j'ai envie de les chanter et de transmettre ces textes qui restent modernes.

Chanter dans une comédie musicale ou dans vos spectacles avec des partenaires vous tenterait ?

Agnès Debord : La formule actuelle convient parfaitement. Car cela me donne la liberté. Il y a un prix à payer mais quand on y a goûté c'est très dur de revenir en arrière. Les projets avec d’autres personnes oui mais dans un autre domaine. J'aimerai travailler avec Alain Gautré un metteur en scène qui vient de la marionnette et du clown dont j'ai adoré le spectacle "L'avare" qui s'est joué l'année dernière.

Quant à travailler avec d'autres partenaires, je n'arrive pas trop à l'imaginer. Et je travaille déjà avec des partenaires que sont les musiciens. Car j'ai toujours voulu travailler avec de partenaires et non des accompagnateurs. Parce que je viens du théâtre et au théâtre on cherche des partenaires.

Que peut-on vous souhaiter ?

Agnès Debord : De chanter jusqu'à 90 ans et puis que ce spectacle marche ! Que cela continue