Les accords et les participes passés laissent à désirer dans votre livret de paroles, cher Jozef, franchement, ça la fout un peu mal. Même si ce n’est qu’un brouillon, ça n’aurait fait de mal à personne une petite relecture. Je ne suis pas recruteur, je n’ai aucune légitimité à critiquer une grammaire bancale, mais quand ça saute aux yeux, c’est comme draguer avec le bec infecté, c’est moyen bof.

Premiers pas en solo, Jozef a longuement bourlingué avec ses potes de lycée le long des routes de France avant d’en arriver là : L’arrivée. Sa première guitare d’ado prenait la poussière dans le passé de ses parents, elle a donc repris un peu la poussière entre les posters de Noir Désir dans la chambre de Jozef, avant de susciter un intérêt plus attentionné. Je parie que c’était pour draguer.

Toujours est-il que ça a dû cartonner, puisqu’il a continué. Il compose, il interprète, il invite ses potes de la génération machin, certes élevée à la téloche, mais pas encore addicted aux écrans de la vie par procuration. Et ça marche encore. Il représente pour la famille, pour les amis, pour la city. Et ça marche encore. Il parcourt alors la patrie avec son groupe, Pass, et séduit par sa voix, par ses textes, par son jeu de scène. Et ça monte, et ça monte encore.

A croire qu’il a passé un pacte avec le diable. Jozef n’a pas lu les petites lignes : c’était un CDI vers la gloire en passant par une cécité partielle. Accident de la route. Dépouillons de ses mots un philosophe : ce qui ne tue pas rend plus fort. Jozef est de ceux-là. Deux albums avec Pass plus tard, le voilà en solo : L’arrivée.

Premiers accords, deux cordes pincées, dzouing dzouing, truc triangle qui ressemble à un cintre, ding ding, rythme scandé dans le sable, scratch scratch, une voix, pas trop grave, pas trop plate, pas trop appuyée, pas trop pincée, une voix de chanteur de bouts de vie, posée et nette. Des rimes, une histoire d’œil qui ne veut pas écrire le guide du nouveau borgne ("Œil pour œil"). Du vécu.

Le solo comme purgatoire donc. L’arrivée depuis le chemin parcouru jusque là. Encore un quasi trentenaire exprimant le mal-être de sa génération ? Oui, et non. Bercé à l’argent et aux objectifs, en première ligne pour la crise, entre deux plans sociaux, incompris par les aînés et incapable de souffler l’espoir aux cadets. Jozef aurait pu en faire un album de déprime. Mais non, il chante le quotidien, l’écart entre les rêveurs et les blasés. Parce qu’il est si facile de se blaser, et tellement laborieux de rêver encore.

Un EP en forme d’itinéraire, une bienveillante introspection en toute indulgence. Ne soyez pas trop durs avec vous-même ! Nous aussi, nous mentons et lisons notre horoscope en disant que c’est n’importe quoi. A suivre.