Avec "La seconda cucina", histoire d'une vie et chronique villageoise dans la Sicile des années 60, Lily Prior livre un roman qui se lit, se déguste, se savoure, se respire, exacerbant tous les sens, qui est simultanément un chant d'amour à la nature, une ode à la vie rustique et le credo du bonheur des choses simples.
Après une longue parenthèse palermitaine au cours de laquelle elle a connu un grand amour avec un bel et mystérieux étranger, "l'Inglese", la quarantaine passée, Rose Fiore qui est une fille de la campagne, est revenue, célibataire et sans enfant, dans son village natal vivre entre ses parents le reste de son âge.
Dans la ferme familiale, la seule fille de la famille a trouvé sa place en devenant la femme de la maisonnée, veillant à l'économat et assurant l'intendance au quotidien et les repas pour la famille et les ouvriers en investissant le lieu stratégique de la cuisine.
Son domaine, son royaume, c'est la "cucina" mais aussi le potager où elle cultive ses légumes et la porcherie où elle élève avec soin les porcs dont elle se charge elle-même de l'abattage et des opérations de charcuterie.
Terrienne animiste, sensuelle et épicurienne dans la plénitude sa maturité, cette femme au voluptueux corps à la Botero s'épanouit dans les plaisirs, ceux de la chère en confectionnant les délices et spécialités de la cuisine sicilienne mais aussi ceux de la chair dans la saine exultation des corps car l'Inglese l'a retrouvée.
La vie de Rosa Fiore est rythmée par les saisons, la cueillette des cerises sur l'arbre, celle du précieux jasmin qui embaumera les desserts, le ramassage des olives et des légumes gorgés de soleil et les petits bonheurs et les grands malheurs du quotidien.
Chapitré comme un menu italien, des antipasti aux dolci, recettes incluses, le roman de Lily Prior, porté par une écriture gouleyante restituée par la traduction de Florianne Vidal, enchante, trouble, restitue l'image tragi-comique attachée à la Sicile avec des épisodes épiques et dresse une beau portrait de femme.