Nous avions rencontré Gilles Gangloff, acteur, auteur, metteur en scène depuis plus de 15 ans, grâce à Gilles Hoyer avec lequel il s'est acoquiné pour former un tandem percutant pour notre plus grand plaisir.

Dans leur interview à deux voix, il nous avait raconté son parcours et nous avions découvert un homme généreux, sensible, boulimique de travail et presque fragile, et un véritable homme de scène.

Avec Caveman, pièce à succès quasi interplanétaire, il revient sur le devant de la scène avec un rôle à la mesure de son talent, ou plutôt de ses talents. Nous avions pris rendez-vous pour cette rentrée. Voilà chose faite.

Quand nous vous avions rencontré le mois dernier à l’occasion de la pièce "La césarienne" que vous avez écrit et joué avec Gilles Hoyer, et vous nous annonciez la reprise du Caveman. C’est aujourd’hui chose faite et ce au Théâtre Le Méry. Comment avez-vous été choisi pour ce spectacle ?

Gilles Gangloff : Joanna Bassi, l’adaptatrice pour la France de la pièce de Rob Decker, m’avait vu à Avignon il y a 3 ans dans un spectacle solo. Je correspondais à ce qu’elle cherchait et ça a été une vraie chance et une rencontre aussi simple que cela. Le spectacle a été créé à Lyon. Puis nous avons voulu le monter à Paris. Nous avons réussi à le jouer quelques mois en 2003 au Ciné théâtre 13. La guerre en Irak nous a été fatale comme pour beaucoup de spectacles. Un projet de reprise au Point Virgule n’a pu se concrétiser faute de place. Nous avons donc dû attendre jusqu’à maintenant. C’est toujours long de monter un spectacle.

Avez-vous participé à l’adaptation du texte original ?

Gilles Gangloff : Au départ, non. Joanna a fait la traduction et l’adaptation. Ensuite, nous l’avons adapté de concert de manière très pragmatique en fonction de mes capacités personnelles.

Ce spectacle conçu pour un personnage sous forme de one man show connaît un succès quasi mondial. A-t-il été évoqué la possibilité de le monter sous un autre format par exemple avec une comédienne qui vous donnerait la réplique ?

Gilles Gangloff : Non. Jamais. L’auteur tient à ce que le format originel du spectacle qu’il a créé soit respecté.

S’agissant d’humour anglo-saxon, il y a eu néanmoins un travail d’adaptation à l’esprit français ?

Gilles Gangloff : Joanna Bassi est polyglotte. Elle maîtrise très bien l’anglais et était donc armée pour décrypter l’humour américain et le transposer à la langue et à l’humour français. Cela étant, il y avait bien sûr des choses injouables en France comme par exemple l’épilogue qui dans le texte original durait plus d’un quart d’heure avec lever de rideau américain. De même, nous avons vu avec la production islandaise que le costume ou les décors envisagés n’étaient pas adaptés car on aurait eu l’impression de faire un spectacle des années 50. Il y a manifestement des différences selon les cultures. Donc il a fallu un vrai travail de transposition.

Question décor et costumes, le spectacle est très sobre. Cela étant, la richesse du spectacle aurait même pu entraîner l’économie d’un décor.

Gilles Gangloff : C’est un vaste débat. Il n’aurait tenu qu’à moi il n’y aurait quasiment rien eu. Cela étant je suis amené à utiliser les quelques éléments du décor pour mettre en situation le propos. Et puis chaque pays a utilisé des décors différents. Je sais qu’en Allemagne, le décor était assez dense un peu comme pour un spectacle de music hall. Joanna a opté pour l’humour-théâtre.

Quel est pour vous l’intérêt et le plaisir de jouer ce spectacle ?

Gilles Gangloff : Je trouve que c’est un très bon spectacle qui a de plus une grande résonance chez les spectateurs. Pas seulement dans la salle mais aussi après. Il n’est pas rare que les couples qui sont venus le voir continuent d’en parler pendant les semaines qui suivent. C’est un spectacle très drôle qui fait réfléchir. Réfléchir entre guillemets bien sûr car il ne s’agit pas d’un pensum ennuyeux. Là réside la force de ce spectacle. Et puis il est intéressant pour moi car il est agréable à jouer. De plus c’est la première fois que j’ai une production derrière moi ce qui m’aide beaucoup.

Vous pouvez donc vous consacrer à votre métier proprement dit.

Gilles Gangloff : Oui. C’est vraiment du plaisir.

Le spectacle en est à sa deuxième semaine de représentations. Avez-vous déjà les retombées en termes de fréquentation mais également médiatiques ?

Gilles Gangloff : C’est encore un peu tôt. Nous avons fait plusieurs présentations à la presse et je pense que cela s’est bien passé. Les retours sont bons mais nous sommes encore en période de vacances estivales. Quant au public, ça part bien. Ce n’est pas complet tous les jours car nous sommes en août mais le public vient nombreux. Et puis, il s’agit d’un spectacle nouveau avec un acteur peu connu donc il faut un peu de temps pour le démarrage. Donc pour le moment la direction du théâtre et la production sont très confiants.

Quelle est la programmation prévue ?

Gilles Gangloff : La pièce est programmée pour 3 mois, d’août à octobre inclus, au Théâtre Le Méry qui envisage déjà une prolongation.

Vous êtes seul en scène pendant plus d’une heure, sans aucune pause, avec un texte dense et un rythme épuisant. C’est une belle performance d’acteur.

Gilles Gangloff : Oui, c’est vraiment le principe du one man show. Cela implique une intensité nerveuse plus forte tout simplement parce que l’on ne partage pas la tension nerveuse avec d’autres comédiens. Cela étant c’est sans doute le spectacle le plus calme au niveau du rythme que j’ai fait jusqu’à présent. J’étais toujours à la puissance 10. Mais c’est vrai qu’il faut ensuite avoir de bonnes facultés de récupération.

C’est sans doute d’autant plus intense qu’il ne s’agit pas de votre propre texte.

Gilles Gangloff : Oui, exactement. Car ce n’est pas forcément mon rythme, mon univers. Donc cela nécessite un gros travail et une forte attention sur scène.

Maintenant le spectacle est totalement cadré ?

Gilles Gangloff : Oui. Bien que nous l’ayons déjà joué, nous y avons apporté encore quelques retouches mais maintenant il est réglé. Cela étant au fil des représentations, il peut se produire des choses qui génèrent de petits changements mais pour le moment il est bouclé.

Le présent et l’avenir immédiat c’est Caveman. Des projets ensuite ?

Gilles Gangloff : Je vais reprendre la mise en scène la pièce "La fille aux pères" qui a été écrite par Fabrice Blind et Michel Delgado qui se jouera au Théâtre Le Méry à 22 heures à partir de novembre grâce à la production Gimmick & Co. Et puis je vais continuer de jouer "La césarienne" une fois par semaine le dimanche au Théâtre Le Triomphe.

Cela vous un emploi du temps bien rempli.

Gilles Gangloff : Oui. Mais cela me convient car il s’agit d’une production extérieure au Caveman et je suis intéressé par ce travail de production. J’ai plein de projets. Mon rêve est de former une troupe parce que j’ai déjà eu un théâtre à moi à Lyon. J’ai envie de faire jouer les autres parce que je suis toujours frustré quand je joue un de mes textes car je ne vois pas la pièce. Mais pour le moment je me concentre sur le Caveman.

Cela étant, il faut toujours penser un peu à l’avenir car je suis tombé plusieurs fois dans ce métier. Tout peut toujours arriver car ce métier est fragile et ce n’est pas être pessimiste que de penser à l’avenir. Et j’ai appelé George (ndlr : George Bush) et il m’a assuré qu’il avait pas d’autres projets qui pourraient contrarier les miens. Et puis il faut avoir des projets pour continuer de créer. Car quand on joue on ne crée plus. Et créer des spectacles est ce qui me plaît le plus.

Avez-vous quelque chose à rajouter ?

Gilles Gangloff : Vive la France ! Ça n’a rien à voir avec le spectacle mais j’aime beaucoup ! Ça me fait rire !