Mélodrame de Odon von Horvath, mise en scène de Hélène François et Emilie Vandenameele, avec Alban Aumard, Bernard Bouillon, Eurydice El Etr, Pierre-Louis Gallo, Jean-Louis Grinfeld, Vincent Marie, Lucrèce Carmignac, Lorraine de Sagazan et Raphaël Almosni.
Les deux membres du Groupe Armes de Construction Massive, compagnie en résidence à Mains d'Oeuvres, haut lieu de "la jeune création contemporaine", et qui se détermine comme un groupe de recherche scénique ayant pour "ambition de faire un théâtre exigeant, insolent et visuellement fort", les actrices-auteures-metteuses en scène Hélène François et Emilie Vandenameele, sont en lice pour le Prix Jeunes metteurs en scène 2011 du Théâtre 13 avec un opus emblématique du théâtre viennois populaire du début du 20ème siècle, "Casimir et Caroline" de Odon von Horvath.
Métaphore visionnaire de l'Allemagne du début des années 30, cet opus se présente comme un mélodrame qui, sur fond de dépression économique et de la traditionnelle fête d'Octobre munichoise, narre l'éclatement du couple-titre pour divergences de vue face à l'avenir qui conduiront néanmoins tous deux à l'accession démocratique au pouvoir de Hitler.
Partant de leur constat quant à un "manque d'amplitude" des spectacles présentés sur la scène française et à l'absence récurrente d’un public populaire, Hélène François et Emilie Vandenameel indiquent se consacrer à la recherche expérimentale, avec combinaison des styles et transgression des genres, à la réflexion sur le théâtre et l'interpellation cathartique du spectateur pour qu'il soit inclus dans le dispositif.
Concrètement cela se traduit par la fameuse suppression du 4ème mur, qui n'est pas une novation, le spectacle se déroulant sur scène, dans la salle, par d'incessantes montées-descentes des marches, dans le hall d'accueil, où le spectateur est accueilli par un verre de bière, et sur le parvis devant le théâtre, et surtout, par le revival seventies avec une réactivation, souvent édulcorée, du théâtre actionniste qui caractérise la génération actuelle des trentenaires. Qu'en penser ? Peut-être s'agit-il de l'extension au théâtre du mouvement appropriationniste mais, du coup, c'est retour vers le futur des années 60.
En trois temps, et avec une nette déperdition du verbe et du propos de l'auteur, le spectacle donne une vision radicale de la plèbe imbécile, frustre et veule. Acte 1 : la dispute des fiancés éclate et des bribes de texte émergent entre deux lampées de bière dont les conséquences, diurétiques et autres, d'une consommation immodérée sont lourdement scandés. D'ailleurs, le lieu scénique principal est constitué d'un podium central sur lequel trônent trois cuvettes de WC, vue arrière, qui font l'objet d'une simulacre d'utilisation réaliste.
A l'acte 2, le corps exulte avec fornication en plein air sur le parvis du théâtre. Acte 3, la fête est finie, les héros sont vidés, dans tous les sens du terme, la rupture est consommée et, une fois les lampions éteints, le retour à la réalité, dans une décharge de pneus, est sans ménagement. Pis, et l'humour belge en moins, qu'un épisode de la série télévisée culte "Strip tease".
Reste à savoir si cette approche sera efficiente pour amener les masses laborieuses, le public populaire cible affichée du Groupe ACM, à investir massivement les lieux théâtraux. |