Texte adapté d'un roman de Bram Stoker dit par Delphine Tellier.

Seule en scène, Delphine Thellier, qui signe à la fois la traduction et l'adaptation du roman "Dracula" de Bram Stocker dont est tiré ce spectacle, nous propose, à la lueur d'une bougie, le récit des aventures de Jonathan Harker, jeune clerc de notaire envoyé chez le comte Dracula pour discuter des modalités de son acquisition immobilière à Londres.

Dans la lignée des contes de veillées, narrés le soir au coin du feu, ce Dracula se veut histoire étrange et inquiétante mais aussi récit initiatique qui aborde tous les thèmes qui ont fait du comte un grand mythe littéraire, le vampirisme, la folie, l'érotisme, l'immortalité, et fouille l'imaginaire collectif populaire.

Dans la salle voûtée en sous-sol du Théâtre Les déchargeurs, on se surprend à frissonner au son de la voix tour à tour roque, enjouée, sucrée, apeurée de Delphine Thellier qui est une éblouissante conteuse et possède un don pour nous faire revivre les scènes retranscrites par Bram Stocker.

Elle joue à merveille du texte et nous fait vivre ce moment à la fois morbide et incandescent avec une force d'autant plus percutante qu'elle est exacerbée par l'intimité humide de cette petite salle, certainement ancienne cave, et par les ombres tremblotantes qui prennent vie que les murs. A tel point qu'on se demande parfois avec horreur (magie des perspectives et génie de la comédienne qui sait accorder de manière très intelligente le placement de la bougie et sa gestuelle) si cette ombre qui s'agite appartient vraiment à la personne devant nous ou si le lieu n'est pas habité.

La mise en scène, très dépouillée donc, exprime parfaitement l'enfermement et la folie qui gagne peu à peu le personnage rongé par les doutes, tel un Hamlet des Carpates. Le roman déborde d'ailleurs de références shakespeariennes qui viennent renforcer ce parallèle.

A la fois dantesque, gothique, étrange, inquiétant et subjuguant, ce spectacle nous plonge complètement, une heure durant, et sans qu'on voit passer le temps, dans un autre univers.

Le seul regret est que cela ne dure pas plus longtemps. Lorsque la bougie s'éteint et la voix de Delphine Thellier se tait, on aimerait savoir ce qui va arriver à notre jeune héros.

Une idée pour un prochain spectacle.