Monologues dramatiques de Elena Issaïeva, mise en scène de Alexandre Velikovski, avec Julie Cousin, Myriam Anbare et Véronique Grisel.

Programmée dans le cadre de l’année France-Russie 2010, "Mon premier homme" est la première pièce d’Elena Issaïeva, secrétaire et membre de l’Union des écrivains de Moscou, à être traduite en français.

Fruit d’une longue campagne d’interview de l’auteure auprès de femmes de tout âge, de tout horizon et de tout niveau social, cette pièce donne la parole à trois femmes, qui évoquent devant nous leur histoire, mais pas n’importe laquelle : celle du premier homme à être entré dans leur vie.

Difficulté de se dévoiler, trouble des souvenirs parfois fantasmés, subjectivité des ressentis, Elena Issaïeva nous montre autant comment ces femmes se sont construites autour de cette expérience que la manière dont leur caractère les amène, chacune à leur façon, à aborder a postériori cette tranche de leur vie.

Alexandre Velikovski, à la mise en scène, a effectué un travail en profondeur sur l’authenticité. Ces trois femmes, qu’on pourrait croire avoir été choisie dans la rue au hasard cinq minutes avant le spectacle, ne racontent pas : elles revivent ce qui leur est arrivé et se livrent entre elles une bataille verbale, avec les armes à leur disposition, pour gagner l’attention du spectateur, non pas dans le but de se plaindre mais parce qu’elles sont intimement convaincue,s comme nous le sommes tous, que leur/notre histoire est plus intéressante que celle du voisin.

Ce spectacle ne pourrait évidemment pas fonctionner s’il n’était pas porté par des comédiennes de talent. Humour, sensibilité, émotion, dérision, toute une gamme d’émotions évoquées avec conviction par les trois femmes sur le plateau, Julie Cousin, Myriam Anbare et Véronique Grisel, formidables de vérité et de passion. Elles crient, rient, chantent au milieu du patchwork poétique qui leur sert de décor et signent toutes les trois une très très belle performance, qui nous touche forcément.

Difficile de ne pas ressortir retourné, tant ce spectacle prend aux tripes et parlent à chacun, homme et femme, à une partie intime et délicate de notre personnalité.

En prime, on assiste à un véritable revirement au cours de la pièce, qui lui donne alors un éclairage nouveau et beaucoup de profondeur, à découvrir par soi-même.