Comédie dramatique de Howard Zinn, mise en scène de Christian Fregnet, avec Emile Salvador.
Howard Zinn, historien et politologue américain, est surtout connu pour son "Histoire populaire des Etats-Unis". Il a écrit quelques textes fictionnels parmi lesquels un ovni théâtral, "Karl Marx, le retour".Le propos est déroutant de simplicité : Marx, à force de harceler on ne sait quelle instance supérieure, a obtenu la permission exceptionnelle de revenir sur terre. Pour une petite heure.
Après avoir erré dans la ville, il arrive dans un nuage de fumée qui cache un sac à dos munis d'ailes blanches. Direct voire un tantinet rustre, il interpelle le public "J'ai lu vos journaux. Ils proclament tous que mes idées sont mortes ! Mais il n'y a là rien de nouveau. Ces clowns le répètent depuis plus d'un siècle." S'emportant, il demande "Quel genre de merde enseigne-t-on dans les écoles par les temps qui courent ?".
Pour tout décor, une caisse en bois, une chaise, quelques journaux étalés sur le sol. Emile Salvador reste seul sur scène. "Karl Marx, le retour" est un long monologue.
On y apprendra pêle-mêle que Marx n'est pas marxiste, que derrière "Das Kapital" se cache un homme qui s'inquiétait pour sa famille, se réjouissait de l'esprit de sa fille Eleanor et qu'il avait des furoncles.
Emile Salvador réussit à faire vivre le texte, s'accaparant l'espace scénique. Tendre quand Marx évoque sa femme, révolté par ce qui devrait passer pour des progrès sociaux presque autant que par le manque de savoir vivre de Bakounine, ce "gros cochon".
Vivant, monologuant avec brio, s'adressant tantôt au public (pour la dialectique ?), tantôt à quelque théoricien qu'il fait revivre dans une conversation fictive, crédible, enlevée et terriblement lucide. Zinn décoche et frappe juste, servi par un comédien qui ne faiblit pas.