Les artistes, aujourd'hui nonagénaires, de la Figuration narrative ont non seulement le vent en poupe mais, bénéficiant d'une belle vitalité artistique, n'ont pas raccroché le pinceau.

Ainsi Erro, artiste d'origine islandaise né en 1932, continue non seulement à peindre mais également et surtout à pratiquer de manière pérenne l'art du collage, le collage, constituant au demeurant l'essence de sa production, qui est ensuite éventuellement transposé agrandi en peinture.

A l'occasion de la donation qu'il a effectué à son profit, le Centre Pompidou organise dans son Cabinet d'art graphique une exposition rétrospectivre particulièrement jubilatoire intitulée "Erro - 50 ans de collages".

Le commissaire de l'exposition, Christian Briend, conservateur en chef au Musée National d’Art Moderne, a opté pour un accrochage thématique (qui correspond à la réalité du travail de l'artiste qui procède par série sur des thématiques au demeurant récurrentes dans le temps.

Dans le white cube que constitue le lieu d'exposition dédié aux arts graphiques, il a élaboré une scénographie dynamisée par des cloisons installées en diagonale.

Par ailleurs, des cimaises et panneaux peints en bleu, la couleur préférée de l'artiste, permettent, de surcroît, un bel effet esthétique pour mettre en valeur les compositiosn narratives saturées d'images et de couleurs.

Des ciseaux, de la colle, de l'humour et un supplément d'âme : de l'art populaire à l'art tout court

Quand Erro commence la pratique du collage, art popilaire, il habitait près d'un dépôt de journaux. Serait-ce l'occasion qui fait l'artiste ?

Ainsi naissent, au début des années 60, les "mécacollages" réalisés à partir d'une revue de mécanique qui rappellent les collages des constructivistes.

Mais le hasard n'existe pas. Il ne faut pa soublier que Erro a été initié à la technique des papiers découpés. à l’École des beaux-arts de Reykjavík et à la mosaique à Ravenne.

Ensuite, l'artiste détournera toutes les images, des publicités commerciales aux images de propagandes politiques, notamment celles des gouvernements communistes, de la Chine à Cuba, des reproductions d'œuvres d'art à la bande dessinée, qu'il s'agisse de comics ou de mangas, pour créer de véritables télescopages tant visuels qu'idéologiques.

Erro dit pratiquer le collage comme certain l'écriture automatique. Il découpe avec un ciseau Thiers et, dit-il : "ça se mélange comme dans un rêve - un rêve à demi éveillé...".

Ses principales sources d'inspiration : la conquête spatiale, la politique, les arts et les comics. Ainsi il épingle Picasso comme le militarisme américain, juxtapose les odalisques et le travailleur russe brandissant le portrait de Lénine.

Oeuvre à part entière, le collage peut constituer l'original d'un futur tableau comme ces "Viva la revolution" qui introduisent l'exposition ainsi qu'un grand collage ("God Bless Bagdad") présenté sans vitre qui augure d'un nouveau mode d'accrochage par plots magnétiques.

La diversité des collages exposés permet d'illustrer les évolutions et explorations menées par l'artiste, compositions horizontales, verticales, puis superpositions, portrait mosaique ou panoramique, avec une curiosité et une sagacité toujours en éveil.