Le cinéma perd son conteur
Le Cinéma est affaire de réalisateurs, voir de metteurs en scène. Cette réalité évidente, ne l’était pas avant que François Truffaut, alors jeune loup aux dents acérées, n’écrive en 1955 un long texte paru dans les Cahiers du cinéma (couverture jaune) et soutenu par André Bazin, rédacteur en chef de la revue.
"De la politique des auteurs", remettait au centre de la problématique cinématographique, le réalisateur/metteur en scène, comme seul auteur véridique de l’œuvre projetée.
Cela, naturellement cachant une autre charge, à la hussarde celle là (quoi que !) contre "une certaine idée de la qualité du cinéma français" qui avait comme but non avoué (mais le savaient-ils) de faire table raz du passé et d’offrir quelques années plus tard la fraîcheur attendue d’une nouvelle vague.
Même si aujourd’hui, la remise en question de ce coup d’état ne fait plus de doute, on ne peut pas nier l’émergence d’un grand nombre de talent qui certains ont signés nombres de films qui resteront comme référence dans l’histoire du Cinéma.
Éric Rohmer (1920-2010) faisait partie de ceux qui, avec Jean-Luc Godard, François Truffaut, Jacques Rivette, Claude Chabrol entre autres, ont su conjuguer l’image et le verbe au même temps.
Éric Rohmer se savait littéraire avant d’être homme d’image. N’a-t-il été rédacteur des Cahiers entre 1957 et 1963. Entretenant encore, la flamme de ce mouvement qui ne s’éteindra définitivement qu’en 1968.
De son vrai nom Maurice Joseph Schérer né à Tulle, l’homme de cinéma sera d’abord prof de littérature avant de rejoindre les bancs de la cinémathèque et retrouver la bande des Cahiers. Il défendra des réalisateurs tels Rossellini, Renoir Hawks ou encore Mizoguchi. Mais il est également et surtout un grand défenseur Hitchcock comme son compasse Truffaut. Comme l’auteur des "400 coups" il consacrera un livre au Maître du suspense co-signé avec Chabrol.
On connaît son talent journaliste, sa prose le conduira en 1959 a écrire et signer son premier film "Le signe du lion" mais il faudra attendre 1969 pour qu’il se voit consacrer avec son film "Ma nuit chez Maud". Déjà présent dans "Ma nuit", on perçoit chez l’auteur, cet observateur des comportements amoureux. Il profitera de son regard pour nous offrir une œuvre que l’on croit légère et dont la complexité se lit dans chaque plan. Et pour bien souligner qu’un film n’est pas une œuvre isolée dans le temps de la projection, il organise des cycles dans lesquels ses films prennent tout naturellement place.
"Contes moraux", "Comédies et proverbes", "Contes des quatre saisons". Autant de chapitres qui résume parfaitement ses paroles : "que mes films sont des contes, pas des contes de fées, mais des contes réalistes comme ceux de Maupassant".
Il reçu en 2001, un Lion d’Or au Festival de Venise pour l’ensemble de son œuvre.