Le Musée de l'Orangerie revient sur le devant de la scène muséale avec une jolie exposition au titre à double sens "Les enfants modèles" consacrée à un registre pictural particulier qui est celui des portraits d'enfants.
Sous titrée "De Claude Renoir à Pierre Arditi", cette exposition propose un voyage au pays de l'enfance et de l'intime dans la mesure où ces enfants modèles ne sont pas des modèles comme les autres puisqu'il s'agit, en premier lieu de modèles non professionnels qui ne se plient pas toujours facilement aux exigences de la pose et en second lieu des propres enfants du peintre ou à défaut de ceux d'amis proches.
Elle propose donc simultanément de feuilleter, en quelque sorte, l'album de famille de nombreux peintres et de quelques sculpteurs, et une promenade à travers l'histoire de l'art du 20ème siècle en remontant même un peu en deça avec Paul Gauguin ou Berthe Morisot.
Dans la partie "Essais" de ce catalogue, Emmanuel Bréon, le directeur du Musée de l'Orangerie qui assure le commissariat de l'exposition, indique que sa genèse est subjective et directement liée à sa fascination personnelle pour les portraits de famille ce qui en fait une exposition plaisir, plaisir qu'il espère partagé avec le public.
Jean-Marc Irollo, historien d'art, rappelle que le véritable portrait d'enfant est apparu au 17ème siècle, soit relativement tardivement dans l'histoire de l'art, alors qu'auparavant la représentation de l'enfant était purement symbolique et, qu'après avoir sévi dans les familles régnantes et la classe aristocratique, il s'est démocratisé et a connu un véritable essor au 19ème siècle.
Avec un titre explicite "L'empreinte de la pose, le petit-fils du peintre Maurice Denis, Paul Denis, psychanalyste, aborde l'œuvre du peintre mais également un parallèle intéressant entre le peintre et le psychanalyste qui saisissent un fragment d'identité du modèle ce qui implique pour ce dernier d'accepter d'être révélé à soi-même et, s'agissant de la peinture en l'espèce, d'être confronté également à l'image d'une personne qui n'est pas un inconnu ou un étranger mais son propre parent.
Marie-Madeleine Massé, conservatrice au Musée de l'Orangerie, se penche sur le jouet qui figure souvent dans le portrait d'enfant et qui est révélateur du monde de l'enfant mais dont la présence, à l'instar du déguisement, ressortit parfois de la véritable mise en scène pour le plaisir des yeux.
Enfin, Marguerite Moquet, ingénieur et responsable de la programmation à l'Orangerie, rappelle que les portraits présentés doivent également être replacés dans leur contexte artistique et dans leur siècle. Témoins d'une époque, et du regard porté sur l'enfant en tant que personne, ce qui est une conception elle aussi relativement récente dans l'histoire de l'humanité, ces portraits s'inscrivent également, et naturellement, dans l'œuvre d'un artiste avec ses choix et ses conceptions picturales, qui, même si elle est, pour ce sujet précis, toujours empreinte de tendresse parentale, dans l'œuvre d'un artiste va au-delà du souci de la simple représentation.
Le catalogue de l'exposition est un ouvrage précieux dans la mesure où la partie catalogue "stricto sensu" présente la reproduction pleine page de chacune des œuvres exposées accompagnée d'un commentaire détaillé concernant non seulement l'artiste quand il n'est pas aussi connu que Picasso ou Paul Belmondo mais le l'enfant lui-même et les circonstances dans lesquelles l'œuvre a été réalisée.