Pièce de Roland Dubillard, mise en scène et scénographie de Caterina Gozzi, avec Luc-Antoine Diquéro, Maya Mercer, Thierry Bosc et Maria Verdi
Roland Dubillard résume ainsi son propos :"C’est
une pièce qui est axée
sur l’acte de manger, sur l’acte d’avaler, de
dévorer. Les locataires sont des êtres dévorants
qui rongent complètement l’intérieur de la maison,
y compris les deux propriétaires. Ce que je fais est à
peine exagéré.
Il s’agit d’une villa au bord de la mer qui doit être
louée parce que les deux occupants sont des jeunes gens,
une jeune fille et un jeune homme, qui n’ont pas d’argent.
Ils sont même menacés par les huissiers. Les locataires
qui arrivent prenant toute la place, finissent par créer
des désordres graves dans la maison."
Voilà pour l'histoire avant qu'elle ne passe par la loufoquerie, l'oeil déformant et le verbe souvent hermétique de l'auteur qui la déconnecte complètement du réel pour la recomposer dans son propre univers tragi-comique.
Ce qui aboutit déjà à déstabiliser les néophytes qui ne sont pas versés dans l'exégèse des textes de Dubillard. Quand de surcroît la mise en scène opte pour un théâtre distancié, il devient évident que le spectateur perd pied. Et quand la mise en scène se complète d'une scénographie qui se complaît dans l'exercice de style, il devient inévitable que le spectateur s'ennuie, assailli de surcroît par un flot de paroles, paroles fusant dans toutes les directions sans cohérence patente.
Une grille quadrillée de fer noir et une sorte de filet de gaze blanche sépare inexorablement la scène des spectateurs. Les propriétaires aseptisés, vêtus de blanc comme des professionnels de la santé, mangent des crabes en attendant l’arrivée de leurs locataires. Elle, la diction monocorde et mécanique, la posture raide. Lui, atteint de logorrhée, attend le plombier pour une fuite de baignoire.
Le rideau blanc disparaît avec l’arrivée des locataires, un couple effrayant de vagabonds vêtus de noir. Lui, sale, hirsute et grossier. Elle, sorte de toupie vibrionnante.
Le public tenu à distance assiste à des échanges surréalistes de paroles, de mots, de phrases qui perdent toute signification.
Une heure après, le noir se fait sur le bruit d’un cognement sur la porte. Toc Toc...une voix off "C'est le plombier !". Trop tard, le spectateur s’est déjà noyé !