"Les encombrants" de Dominique Sampiero raconte l'histoire de Jean qui fait partie de cette race d'enfants qui n'ont pas eu de chance, que le destin a marqué du sceau de l'abandon, de la différence et de l'indifférence.
Comme dans les temps anciens ou dans les pays reculés, où chaque village avait son idiot ou sa demeurée, ces êtres désignés pour le malheur et l'opprobre dérangeaient et on les tenaient soigneusement à l'écart, en réserve, comme un paratonnerre pour se protéger de la foudre, boucs émissaires tout désignés en cas de besoin.
Dans sa demeure qu'est la forêt, le ciel lui servant de toit, cet enfant sauvage vit de petites rapines comme un chat errant et de la charité de quelques villageoises qui lui déposent quelques habits, et qu'il remercie en leur déposant des bocaux d'eau de pluie. L'eau, qu'elle soit rosée, pluie ou eau dormante, est omniprésente dans son univers.
Et puis il y a une jeune fille qui rêve d’amour. La suite se devine. L'histoire d'un amour impossible, un drame universel et intemporel - on pense à "Motobécane" le texte de Bernard Crombey et à des faits divers récurrents - qui va ensanglanter cette nature immuable.
Dans un style très épuré, une langue aussi terrienne que poétique qui s'élève vers le ciel, Dominique Sampiero livre un conte lumineux, une légende. Croit-on encore aujourd'hui aux légendes ? "Mais les légendes aujourd'hui personne n'y croit car on ne croit plus en rien ni en personne. On meurt en silence à côté des autres en étouffant sa plainte, le chant unique d'une agonie dérange la belle parole."