Sylvie Selig expose pour quelques trop rares jours à la l'Espace Commines les toiles de sa dernière série en date "Screen of my dreams".
Sur des structures atypiques, à la manière des bâches tendues, Sylvie Selig projette sur des toiles de lin de grand format réminiscences et vagabondages mnésiques suscités par le visionnage de films de cinéastes qui ont marqué l'histoire du cinéma tant par la forme que par leur univers, de Ernst Lubitsch à David Lynch, en passant entre autres par François Truffaut et Federico Fellini, et des films devenus cultes, tels "Les oiseaux" de Alfred Hitchcock.
Des toiles poupées russes : comment le film, par la puissance évocatrice de l'image, qui raconte une histoire constitue le terreau d'une autre histoire, celle née de l'imaginaire du peintre qui devient le narrateur et le médium et celle que le spectateur va, à son tour, deviner, compléter, transformer ou imaginer.
Les fleurs nouvelles qu'elle rêve
Sylvie Selig use de ce processus créatif pour créer des prémisses narratifs basés sur des rapprochements cinématographiques patents, tel Quentin Tarantino et Takeshi Jitano, mais également des télescopages entre la peinture, le cinéma et la littérature.
Ainsi
Alfred Hitchcock solidement assis dans son fauteuil de réalisateur
devant la maison de "Psychose" qui semble bien inoffensive
de jour, est entouré par des mouettes rieuses, alors
que dans son dos Patricia Hightsmith le menace d'un couteau.
Et, en arrière plan, une femme se douche est contemplée par un Norman Bates qui a pris les traits du peintre Edward Hopper dont on aperçoit le reflet dans une glace.
Peintre figuratif et symboliste, Sylvie Selig pratique un art du caché, de l'invisible et de l'indicible même si les images et les mots sont apparemment explicites.
On pense à Chagall pour le symbolisme du bestiaire omniprésent, l'animal symbole ou totem de la figure représentée - le taureau pour Almodovar et Picasso au second degré - et la femme qui vole. A Picasso, justement, pour certaines figures de femmes, une solide femme picassienne hybridée avec la femme symbolique, vénus boticellienne. Ainsi pour la toile inspirée par "Le mépris" de Godard, elle se substitue au sex-symbol français des années 60 se mirant dans le miroir habité par Godard accompagné de la célébrissime réplique "Tu les trouve jolies mes fesses ?".
Et c'est Sylvie Selig elle-même qui vous accueille.