Récital de Jean Claude Dreyfus accompagné par Thomas Février (piano) et Julien Amedro (violoncelle).

En mars, le Vingtième Théâtre donne une carte blanche à Jean-Claude Dreyfus, comédien et metteur en scène, qui propose au public un spectacle dramatique, "Rictus ou les soliloques du pauvre" qu'il a conçu, mis en scène et qu'il interprète avec Fabrice Carlier, à partir des poèmes d'un écrivain de la Butte Montmartre sur le Paris populaire des vaincus du début du 20ème siècle et un tour de chant.

Dès lors qu'un artiste aborde un registre différent de celui dans lequel il est notoirement connu, banalité est de qualifier sa prestation comme révélant une autre facette de son talent. Et cependant tel est bien le cas avec ce récital singulier, néo-réaliste et intimiste qui dévoile, pour ceux qui sauront l'écouter, les désirs, les ombres et les peurs de l'homme.

Jean-Claude Dreyfus, personnage à la stature généreuse et au verbe truculent, a élaboré un tour de chant, au sens premier et noble du terme, intitulé "Jean-Claude Dreyfus chante en toute sobriété", qui ne sévit pas dans la gaudriole. En effet, accompagné de la complainte d'un violoncelle et d'un piano au toucher délicat, il chante les déchirure et les sentiments équivoques, aime les putes et les marins, et module sa voix de stentor au midtempo.

Sobriété effectivement même si cheveux tirés en chignon, jupe-pantalon de smoking, il se drape dans le rideau de scène de soie fuschia comme une cocotte de caf'conc ou se glisse autour du col le boa noir de la grande Eugène. Comédien, il invente un nouveau personnage qu'il a nourri de sa propre chair. Chanteur, il habite des textes qui ont été écrits spécialement pour lui et lui constitue un bien beau répertoire intemporel.

Le tour de chant évite le minimalisme compassé et s'habille de lumières très travaillées et est confié, pour la partie instrumentale, à Julien Amedro au violoncelle et au piano de Thomas Février qui signe l'ensemble des arrangements et a confectionné un bel écrin aux sonorités très contemporaines pour un répertoire résolument néo-réaliste.

Jean-Claude Dreyfus interprète avec générosité et amour des textes qui s'insèrent dans le répertoire classique de la chanson française de belle facture, dont Philippe Minyana ("Le mâle détruies"), Fabrice Carlier ("La lumière des fantômes") et Ivane Daoudi ("Assurément") signent les plus beaux opus, et offre ainsi au public un vrai spectacle de qualité.