Comédie dramatique de Pauline Sales, mise en scène de Gérard Chouchan, avec Marion Privat.
Menue, recroquevillée, elle s’adresse à sa petite fille pour lui expliquer qu’elle l’emmène en voyage au Groenland : eldorado de ses fantasmes, lieu le plus éloigné possible de toute sa petite vie triste et grise qu’elle exècre et où elle étouffe à petit-feu. Ce voyage apparait alors comme une fuite en avant, le seul salut possible avant l’enfermement.
Et les voilà parties, elle qui s’enfuie et sa fille qui freine des deux pieds, pour ce pays aussi lointain que chimérique. Une virée peuplée d’épisodes burlesques ou angoissants le long de ce parcours aussi poétique qu’illusoire mais dont les rencontres vont la faire revenir à la réalité.
Bien-sûr, elles n’arriveront jamais au Groenland (quoi que …) mais ce périple sera surtout le voyage intérieur d’une femme, sa remise en question et le lien fragile qu’elle essaye maladroitement de tisser avec sa fille, sans y parvenir vraiment.
Dans une lumière rare (beau travail de Romain Mazaleyras), Marion Privat, seule en scène, est absolument captivante du début à la fin. La comédienne, dirigée avec précision par Gérard Chouchan, passant par tous les états, nous immerge de plain-pied dans ce road movie insolite, sombre et brutal ; un portrait de femme extrêmement bien dessiné par Pauline Sales : qu’on ne peut ni blâmer ni haïr, pas plus qu’on ne peut l'aimer, mais qui ne nous laisse jamais indifférent …
Il subsiste, bien au-delà de la représentation le souvenir tenace de ce personnage-là et de ce voyage, signe d’un spectacle d’exception.