Comédie dramatique de Rachid Djaïdani, mise en scène de Habib Naghmouchin, avec Tony Mpoudja et Salim Kechiouche.
Yazad, ou Yaz comme on l'appelle au quartier, vit dans une cité de la banlieue parisienne. "Mon âge est de 21 ans, je porte un jean 501, sur mon poignet droit une gourmette en argent avec le prénom d'Hamel, mon défunt petit frangin", un frère mort de la drogue, un "big frangin qui deale après avoir été gigolo".
Voilà comme il se présente. Au chômage, il vit au 12éme étage d'une tour, aime la vie mais surtout rêve d'écrire un livre. Son meilleur ami, Grézi, lui, ambitionne de vivre à Los Angeles. Une chevalière en or au petit doigt, il rêve d'argent, un argent qui coulerait à flots.
Puisque la banlieue est à la mode et que les médias en raffolent, Yaz va écrire sur la vie de la cité. Il va noircir le papier avec des mots qui racontent le quartier, le quotidien des gens qui le peuplent. Il veut livrer toutes ces anecdotes qui animent les grandes tours, des anecdotes que Grézi s'engage à lui confier.
Le pacte moral entre les deux jeunes est alors scellé, un contrat qui va coûter plus cher qu'il ne va rapporter... Au fond du boumkeur l'amitié se noircira. Les pages resteront blanches et les mots laisseront place à la trahison.
Habib Naghmouchin a tout misé sur le récit percutant de Rachid Djaïdani, le mettant en valeur par une mise en scène simple, presque nue à l'image de la banlieue que l'auteur déshabille pour l'offrir au public.
Les mots claquent et résonnent, au milieu de ce savant mélange de langage parlé et soutenu. Ils font rire quand ils ne font pas mal. Parfois doux comme une caresse ils peuvent être très vite envoyés comme un coup violent reçu sur un ring. Leur enchaînement peut s'apparenter au slam, une genre utilisé pour parler d'une banlieue sans clichés.
Les personnages touchants, interprétés par deux comédiens au charisme transpirant, crachent les mots pour nous transmettre leur force. Une force visible, presque palpable, sur le visage tantôt lisse, tantôt rude des deux hommes. Chaque geste et chaque regard vie d'émotion et d'envie.
Les jeunes comédiens, Tony Mpoudja et Salim Kechiouche, nous portent dans cet univers que l'on touche et que l'on frôle sans toujours le comprendre. Par leur présence ils nous emmènent avec eux, nous font voyager dans leur poésie et dans leurs rêves.
Un spectacle fort, drôle et émouvant. Des textes plein de rage, une rage de vivre, d'aimer et d'être aimer.