Ron Arad, designer et architecte britannique né en 1951 à Tel-Aviv, figure majeure de la création contemporaine.

Voilà une présentation sommaire pour ceux qui ignorent encore l'identité du créateur de pièces iconiques telles la chaise coque empilable "Tom Vac" ou l'étagère métallique en forme d'escargot "This mortal coil".

Tout savoir sur Ron Arad est possible avec "Ron Arad - No disicpline", l'exposition exceptionnelle en forme de rétrospective présentée par le Centre Pompidou sous le commissariat de Marie-Laure Jousset, conservatrice du centre.

"No discipline" parce Ron Arad se veut architecte, architecte d'intérieur et designer, parce que le design est aux confins des beaux-arts et de l'architecture, de l'art et de la création industrielle et qu'il revendique la liberté créatrice et prône la singularité, des préceptes qu'il transmet à ses étudiants du département design du Royal College of Art de Londres.

Placée sous le signe de l'effervescence créatrice, la scénographie, époustouflante, est conçue par Ron Arad lui-même.

Ordonnée autour de la courbe de l'étagère "Bookworm" qui est retenue comme signalétique et où le cartel est remplacé par des collages au sol, joue sur les ombres et les lumières, pour initier un parcours déambulatoire au pays de "l'homme qui aime les chaises".

Ron Arad raconte une histoire, la sienne, à la riche iconographie, comme un voyage, qui commence par une reproduction du hall en ellipse et de l'escalier de l'opéra de Tel-Aviv, réalisé en 1994 qui ouvre sur l'espace consacré aux projets architecturaux.

Il se poursuit dans le serpentin "One Off" dédié à l'exposition abondante des pièces uniques, des prototypes et des créations de studio.

Le nombre de pièces exposées est impressionnant et chacune de ces "chaises-sculptures" ressortit au domaine de l'art.

Futuristes ("Tinker chair"), surréalistes ("Chair by its cover, why dog?", spectaculaires ("Rolling Volume"), rutilantes (série "Bodyguards"), puissantes "Afterthought" ou ludiques (série "Oh voïd"), elles dressent un panorama étourdissant.

Dernière étape, l'espace "Design industriel", ouvert sur rue, qui recense les pièces industrielles présentées, notamment, dans une cimaise multi-tubulaire abritant vidéos et créations industrielles.

Lumière du jour et couleurs pétantes scandent les collaborations de Ron Arad avec les grands éditeurs tels que Alessi, Cappellini, iGuzzini, Driade, Kartell, Magis, Moroso ou Vitra.

L'ensemble est d'une réussite absolue notamment en qu'il éclaire le processus créatif de son auteur.

"When dreams may come, when we have shuffed off this mortal coil, must give us pause"*

Le credo de Ron Arad, "Inventer ce qui n'existe pas", s'organise en deux fondamentaux.

D'une part, le design conceptuel avec l'épure de la ligne et de la forme qui tend au graphisme - et en ce sens il applique le postulat d'un de ses maîtres, Ettore Sottsass, qui concevait le design comme une calligraphie.

D'autre part, l'expérimentation pratique basée sur l'exploration des matériaux et l'utilisation des technologies de pointe.

La ligne, c'est la courbe. Peu de lignes droites et d'angles vifs, l'astucieuse chaise à géométrie variable "Box in four movements", le fauteuil "2 R not" et la table "Happy days" constituant des exceptions qui confirment la règle, mais une farandole de déclinaisons de la courbe, symbole dynamique de la fluidité.

D'où un vocabulaire formel unique aisément identifiable, et totalement récurrent, à l'instar du ruban qui atteint le dépouillement absolu avec la chaise "Before summer".

Ainsi, même si Ron Arad brouille les pistes avec les noms "pasta-pizza" de la chaise-tapis "London Papardelle" ou la lampe "Pizzakobra".

Autre variation, celle inspirée du classique fauteuil-club qui donne aussi bien le fauteuil "Big Easy" que le "Well tempered chair" que le "Big Soft Easy" selon le degré d'épure.

Récupération de forme qui ramène au début de l'histoire.

Ron Arad débute sa carrière de designer, presque par hasard, avec des meubles créés dans l'esprit des ready-made et sous le signe de la récupération pratiquée par les nouveaux réalistes.

Déjà la confusion des genres entre art et design, tels la la lampe "Aerial", le fauteuil "Rover Chair" ou encore la chaîne hi-fi "Concrete Stereo" incrustée dans un bloc de béton.

L'expérimentation des matériaux et des nouveaux composants, du métal au Corian, participe du contre-pied, ployer le rigide et rendre dur le mou, pour en explorer.

Parmi les fondamentaux en détourner, tant les propriétés physiques que les qualités esthétiques, du miroitement de l'aluminium à la transparence de la silicone.

Le métal se tisse, devient cote de maille ("Loop Loop") ou ressort à lame ("Sit"), le silicone ressemble à du sucre filé ("Bi-voïd") et le brut de décoffrage de la chaise "Tom Vac" devient à son tour fauteuil ("Uncut").

Et ce n'est qu'un échantillon des pièces à découvrir dans cette rétrospective exceptionnelle à ne pas rater avant son départ pour le Moma de New York