Après avoir contribué, en 2007, à la conception de l'exposition "Le Nouveau Réalisme" dans laquelle Jacques Villeglé figurait en bonne place dans la section thématique "Construction-Déconstruction du réel", le Centre Pompidou lui consacre, en 2008, un exposition rétrospective intitulée "Jacques Viilleglé - La comédie urbaine".
Conçue sous le commissariat de Sophie Duplaix, conservateur au Musée National d'Art Moderne au Centre Pompidou, dans une scénographie classique mais cependant dynamique avec des cimaises tronquées, cette rétrospective de plus de 60 ans d'activité est organisée selon un parcours chrono-thématique qui sied à un artiste dont le matériau unique, l'affiche lacérée, détermine les différentes étapes de son œuvre.
Jacques Villeglé, le Lacérateur Anonyme de A à Z
De sa première oeuvre réalisée avec Raymond Hains ("Ach Alma Manetro") en février 1949 à son alphabet socio-politique qui constitue aujourd'hui son seul oeuvre, Jacques Villeglé a exploré tous le vocabulaire formale des affiches.
Collecteur
d'affiches prélevées sur les murs urbains, il
ne choisit pas l'affiche simple, mais les couches d'affiches,
celles qui ont été superposées en mille
feuilles, qui ont été arrachées ou qu'il
épluche.
A partir de ce substrat, il élabore, par marouflage sur toile, des objets résultant du simple effet du temps et de l'action de mains anonymes qui se présentent un peu comme des cadavres exquis.
Des objets graphiques qui deviennent des oeuvres d'art par l'acte d'arrachage par l'artiste dans une démarche conceptualiste.
Compte tenu de l'évolution de l'art graphique, il constitue
un thésaurus documentaire inestimable qui est considéré
comme une mémoire de la société française
d'où le titre de l'exposition.
Par ailleurs, totalement dépendant de l'évolution de l'art graphique, les oeuvres se déclinent en série selon qu'elles naissent des affiches politiques des campagnes électorales, des affiches de publicité commerciale ou des affiches d'expositions et de concerts.
La politique de nettoyage des murs parisiens, la disparition des palissades de terrains vagues marquent le déclin de l'affichage sauvage et réduit le champ exploratoire de Villeglé qui se "décentralise" à Lille avant d'ouvrir un atelier en Aquitaine.
On peut y trouver des oeuvres qui rappellent les collages dadaistes
comme celles qui se rapprochent de peintures abstraites ou des
oeuvres lettristes.
Intéressé essentiellement par le caractère typographique des affiches, il revendique d'ailleurs explicitement son appartenance au mouvement lettriste.
De la typographie aux traces et au signes il n'y a qu'un pas et l'exposition permet de découvir un aspect sans doute moins connu du travail de Villeglé avec ses ardoises d'écolier et son un abécédaire socio-politique.