Voici enfin le disque que tous les vieux babas défoncés jusqu’à la moelle attendaient depuis près de 30 ans, le premier album solo de Jorma Kaukonen : "Quah" !.

Malgré le crash de l’Airplane fin 1972, ses ex-membres ne se laissent pas gagner par l’apathie générale/gueule de bois post-hippie en fondant aussitôt le label ‘Grunt’, base des premiers efforts solos de Paul Kantler et Grace Slick. Quant au généralissime soliste, la reformation de son groupe de toujours - Hot Tuna, avec son ami et également bassiste du Jefferson Airplane, Jack Casady -, fin 1969 pour quelques shows en Californie, avait déjà donné une orientation nouvelle à sa carrière au moment où celle de l’Airplane commençait à battre de l’aile.

Exit donc les délires psychédéliques sous acide, les deux compères reviennent aux racines de la musique américaine en jouant une sorte de blues-folk acoustique d’une beauté stupéfiante ("Live in Berkeley"). Après plusieurs disques avec Hot Tuna, Jorma Kaukonen décide en 1973 de faire une pause et choisit cette fois de s’associer à Tom Hobson, songwriter rencontré avant la formation de l’Airplane.

Le concept initial de ce disque est basé sous le signe de la collaboration : une face pour chacun des deux musiciens. Cependant RCA met son veto après l’écoute des premières maquettes, déclarant les compositions de Tom Hobson impropres à être commercialisées : à charge donc à Jorma Kaukonen d’écrire de nouveaux morceaux pour remplacer ceux de Tom Hobson, lequel n’est pas pour autant évincé du projet – d’ailleurs crédité Jorma Kaukonen with Tom Hobson -.

Sous une sublime pochette peinte par Margaret Kaukonen (la femme de Jorma), "Quah" demeure dans l’esprit très proche des disques de Hot Tuna (Jack Casady assure ici la production), des reprises du Reverend Gary Davis sont toujours au menu au même titre que des passages de picking hallucinants, véritable marque de fabrique du guitariste ("Lord Have Mercy").

A noter également dans un autre registre, la présence d’un orchestre à corde sur trois titres de Kaukonen ("Genesis", "Song For The North Star" et "Flying Clouds") qui donnent véritablement une assise à des compositions déjà de très haut niveau. Seuls deux chansons de Tom Hobson échappent à la censure de la maison de disque - "Blue Prelude" et le magnifique "Sweet Hawaiian Sunshine" - qui se rattrape sur cette réédition en proposant en bonus deux autres morceaux devant être intégrés au projet original.

Et au fait pourquoi Quah ? Tout simplement le souvenir – l’onomatopée plutôt – d’un bruit de briques cassées par Mickey Heart (un des batteurs du Grateful Dead)… décidément… quelle époque !!