"J'ai les cuisses qui se touchent parfois 
J'dis des balivernes quand on m'écoute pas 
J'ai un prof de tennis qui m'a touché là où fallait pas 
Depuis j'suis un peu ping-pong ding-dong 
Oui, c'est qui ? 
Qui, qui, qui, qui 
Qui, qui, qui, qui"

Ce serait une grossière erreur que de considerer la jeune chanteuse franco-coréenne de 26 ans comme un simple produit marketing. Chose qui la blesse particulièrement (elle le dit très bien dans "Yes"). Ce serait passer à côté d’une fine parolière inscrite dans son temps (avec le langage de son temps), d’une véritable musicienne (et pas que puisqu’elle touche également à la réalisation de courts-métrages comme Juste à côté en 2021 avec Thomas Guerlet) qui n’est pas née avec Graou, EP sorti début mars (elle fait de la musique depuis 2020, plusieurs EP plus ou moins difficiles à trouver sur internet).

"Addict au digital, caresse ton animal"

Loin de la petite chanteuse écervelée, la demoiselle sait s’entourer de quelques faiseurs de tubes  : Tristan Salvati (derrière des titres d’Angèle ("Balance ton quoi", "La loi de Murphy", "Libre", "Flou"…), Louane ("Maman", "Chambre 12"), M. Pokora ("Les planètes") ou Cœur de Pirate ("Prémonition", "Somnambule")), Canblaster (ex-membre du quatuor Club Cheval), LUCASV. Surtout, elle maîtrise plutôt bien son flow, le groove, son environnement sonore : mélange de hip-hop, d’electropop avec de fortes influences du Yellow Magic Orchestra (ce n’est clairement pas commun), de jazz et un phrasé un très, très laidback.

"Un jour c'est bon, un jour t'es con 
Comme quand t'aimes plaquer ma tête contre la plaque de la cuisinière 
J'aimais l'idée que c'était pour me tenir chaud"

S’il y a quelque chose de presque enfantin chez elle, en tout cas comme si elle voulait rester dans une sorte d’enfance – adolescence éternelle, il faut gratter un peu (pas beaucoup) pour comprendre qu’elle préfère les côtés sombres à la lumière, qu’elle aborde certains thèmes assez frontalement comme avec le glaçant "Roger Rabbit" (et qui fait suite à "Cartoon sex") sur la pédophilie, le féminisme, l’amour heureux ou malheureux, le sexe, souvent de manière sombre et assez crue. Des paroles qui touchent, bouleversent, font sourire aussi.

Suite logique de Graou (dont on retrouve "Echec et mat", "Miki cowboy", "Cartoon sex", "jtm encore") avec des titres comme "Roger Rabbit", "BNF", "Particule", cet Industry Plant est donc une (très) belle réussite.