On avait découvert le groupe originaire d’Asheville en 2023 avec leur précédent disque Rat Saw God. Malgré un excellent accueil critique, nous n’avions pas été si enthousiastes. En revanche, le très bon album solo de MJ Lenderman (guitare) nous a poussés à écouter ce nouveau disque, qui s’avère, lui, tout simplement excellent.

Tout d’abord, un événement notable dans le contexte est la rupture personnelle entre Karly Hartzman (chant / guitare) et MJ Lenderman. Bien que les morceaux aient a priori été écrits avant la fin de leur relation, cette séparation semble avoir eu un impact sur l’écriture de Hartzman.

Côté son, Bleeds mélange alt-rock, grunge. country et shoegaze, où la douceur des mélodies côtoie des explosions bruitistes dans une veine que certains appellent désormais "countrygaze".

L’album s’ouvre avec "Reality TV Argument Bleeds", morceau à la tension croissante, porté par des distorsions de guitare. L’ambiance évoque immédiatement quelque chose à la Twin Peaks : très américaine en apparence, mais traversée de failles étranges. 

Le rythme s’apaise avec "Townies", avant de reprendre avec la ballade électrique "Wound Up Here (By Holdin On)", probablement le meilleur titre de l’album. "Pick Up That Knife" joue sur les ruptures de style, passant du folk à des riffs plus rugueux, quelque part entre Courtney Barnett et Dinosaur Jr.

On retrouve l’influence country sur "Elderberry Wine", ainsi qu’une atmosphère plus brumeuse sur "Candy Breath". Avec "Wasp", une déflagration hurlante d’une minute vingt, Wednesday explore un versant noise. Enfin, à travers des textes sombres et saisissants, les deux derniers titres, "Carolina Murder Suicide" et "Gary’s II", dégagent une émotion brute.

Bleeds est une œuvre dense et authentique, qui blesse autant qu’elle émeut. C’est également une plongée dans les profondeurs et les failles de l’Amérique contemporaine. Une réussite.