Oui, bon, d’accord, Les trois Mousquetaires aussi étaient quatre, alors Jean-Michel Riou peut bien écrire le quatrième tome de la trilogie Versailles, le Palais de toutes les promesses.

Sacré Jean-Michel ! Les fans vous l’ont demandé, vous l’avez fait. Il est vrai que la trilogie présentait un goût d’inachevé. Forcés de laisser nos héros, nous en redemandions. C’est l’effet que fait la fin d’une série, la fin d’un cycle : déjà ? Non ? Encore ! Et vous avez cédé à nos caprices de petits lecteurs, comme un sweet écrivain fétiche. Attention, nous risquons d’en demander un cinquième. Ou un préquel.

Nous voici donc avec Le dernier secret de Versailles, pour tous, surtout pour les fans, mais pour les autres aussi. Les résumés des trois premiers épisodes, le vrai du faux, des annexes photos (pour rendre leur visage aux noms des protagonistes), tout y est. Un dernier roman comme un retour sur scène après les adieux, pour ne pas se quitter comme ça. Il semblerait que cette douce tradition soit toute française en matière de concerts, pourquoi ne pas la pérenniser avec les romans ?

Certains mécontents le trouveront un peu réchauffé, d’autres critiqueront les redites, d’autres encore le trouveront inutile, les plus calculateurs prétendront une conjecture frileuse aux nouvelles idées. Tant pis pour eux, quand on aime, on ne compte pas.

Allons-y. A Versailles. Le rêve d’un roi qui ruina la France par ennui. Louis XIV vécut longtemps, très longtemps. Il explosa toutes les statistiques du XVIIème siècle en matière de longévité. Il eut donc beaucoup plus de temps pour vider les caisses du royaume en menant guerres et constructions pharaoniques.

Jean-Michel Riou a choisi de raconter la construction de ce poulailler à cocottes poudrées et à courtisans obséquieux de condescendance. Louis XIV voulait simplement avoir tous ses lèche-bottes sous les yeux. Il ne savait pas que c’était impossible, alors il l’a fait (Churchill ne parlant pas du tout de monarchie française). D’un minable relais de chasse planté au milieu d’un marais puant, Louis XIV a rêvé un palais herculéen, des marbres, des fresques, des jardins, un détournement pur et simple de la Seine. Il n’était pas le roi Soleil pour rien, et ce que le roi veut, le roi obtient.

Des artisans venus de toute la France et de l’Europe convergent autour du chantier de construction, déclenchant jalousies, confrontations et petites joies. Et avec l’immigration, les logements ouvriers, les tavernes, les maquereaux et la contrebande. D’un côté, la famille Pontgallet et son entreprise de maçonnerie jalousée, de l’autre, le Roi Noir de Versailles, poursuivi par la Reynie (police royale) pour une liste de méfaits longue comme une jambe d’Adriana.

Ils se sont croisés, déchirés, réconciliés, séparés. Nous les retrouvons voûtés sous le poids de leurs secrets. Qui a tué son père ? Qui est le Roi Noir ? Et ce riche Don La Fragua ? Il sort d’où ? Cette fille met-elle en danger la reine ? Peut-on faire confiance à ce jésuite de Marolles ? Les réponses sont dans cet ultime roman.

Jean-Michel Riou a compris depuis longtemps que les petites histoires font les grandes épopées. Il nous emmène avec lui dans les fondations du plus ostentatoire des palais, miraculeusement né de la boue par les mains habiles de milliers d’artisans. Un inoubliable voyage dans le temps. Délicieux. A déguster avec un seau de boisson chocolatée (et une paille).