Comédie dramatique de Friedrich Dürrenmatt, mise en scène de Christophe Lidon, avec Yves Gasc, Simon Eine, Gérard Giroudon, Michel Favory, Christian Blanc, Céline Samie, Christian Gonon, Danièle Lebrun, Samuel Labarthe, Noam Morgensztern, Didier Sandre, Pauline Méreuze, Fabrice Colson et Xavier Delcourt.
Jouée pour la première fois au Français, "La visite de la vieille dame" de Friedrich Dürrenmatt offre aux comédiens une partition chatoyante, prétexte à de savoureux numéros d’acteur. Edwige Feuillère ou Mary Marquet y excellèrent jadis.
Madame Zahanassian, milliardaire et excentrique créature, qui collectionne maris et panthères, revient dans sa ville natale, trou infâme, autrefois prospère, où les grands express européens ne s’arrêtent plus. La "communauté" attend ce mécène redoutable, avec l’espoir d’une nouvelle prospérité.
Mais la vieille dame arrive pour se venger atrocement d’un amant qui l’a délaissée, ivre de rancune et de ressentiment. La "communauté, pasteur en tête, désireuse de profiter des largesses de la harpie, n’hésitera pas à écraser l’homme seul, entrave gênante.
Fable un peu gauche, datée, alourdie par une traduction approximative ("décombres" d’un train au lieu de "débris", choix du mot "empathie", mot bête et éphémère) le texte ne vaut que par l’offrande de belles envolées.
Danièle Lebrun, immense comédienne, donne le meilleur d’elle-même,"Sarah Bernhardt" (jusqu’à la jambe de bois) méchante reine de contes, maquerelle glacée au cœur mangé par l’avidité et verdi à l’adoration du dollar. C’est sublime.
Autour d’elle, Samuel Labarthe compose un Alfred (l’amant objet de haine) bouleversant, jeune homme vieilli par sa vie, tandis que Michel Favory incarne un vieux professeur, image de la civilisation et de la hauteur de vue, magnifique.
Didier Sandre apporte la touche d’inquiétude, avec son abominable "pasteur dans le monde", qui ne sert plus…que le monde. Yves Gasc, Christian Gonon ou Simon Heine sont terrifiants en notables voraces et nuisibles.
La mise en scène de Christophe Lidon est tour à tour naïve (on songe aux bandes dessinées) et angoissante (costumes hideux et fond gris), efficace et très pensée. Un moment de vrai théâtre avec, en plein feu, avant les mots, ses servants amoureux et inspirés.
