La séquence d'ouverture du film, où l'on suit le parcours d'une bille noire sur un absurde, long et inutile mécanisme en cascade de poulies et balanciers l'amenant à déclencher le mouvement d'un train miniature destiné à l'emporter sur des rails posés à travers champs sur le lieu du crime, donne le ton, celui du ludique et du surréaliste.
Le mérite de ce film est de nous entraîner, sur le mode du divertissement – genre prisé du réalisateur - sur les traces de Rouletabille pour résoudre le mystère de la chambre jaune, roman de Gaston Leroux, dont sont conservées les caractéristiques essentielles (le rythme feuilletonesque, une intrigue à la Edgar Allan Poe, l'enquête déductive basée sur le bon bout de la raison, l'énigme tarabiscotée et les personnages stéréotypés des romans populaires du début du 20ème siècle tels l'inventeur ou le journaliste d'investigation) mais aussi, en parallèle, sur un jeu de piste, comme ceux de notre enfance, imaginé par Bruno Podalydès.
En effet, Bruno Podalydès, en s'attaquant à un classique du genre, nous propose une adaptation réussie du roman de Gaston Leroux dans lequel le célèbre et mythique reporter Rouletabille et son ami photographe Sainclair tentent de résoudre l'énigme de la tentative d'assassinat perpétré dans un lieu clos, roman riche en déguisements, chausse-trapes, fausses pistes et revirements de situations, qui s'avère idéal pour une mise en images jubilatoire.
Et, sans dénaturer le propos originel, il l'adapte à ses centres d'intérêt, ce qui est le propre de la création artistique ; en hommage à ce qui nourrit le cinéma (le roman, la bande dessinée, Podalydès est un tintinophile, et le cinéma, celui d'Hitchckok et de Resnais, à qui le film est dédié) le film est truffé d'indices et de références plus ou moins patents.
Entouré d'une pléiade de têtes d'affiche loin de leurs répertoires habituels : Michael Lonsdale en inventeur hébété, Sabine Azéma en victime du destin, Claude Riche en juge d'instruction dilettante et Pierre Arditi en policier retors, Denis Podalydès, accompagné par Jean-Noël Brouté désopilant de naturel dans le rôle du faire valoir gaffeur, trouve là un rôle sur mesure en incarnant le mythique Rouletabille façon Tintin survolté.
Loufoque, burlesque, surréaliste, ce film témoigne d'un réel
talent créatif puisqu'elle ne se contente pas d'une mise en images,
et les variations de Bruno Podalydès, comme l'étude en peinture,
sont la marque à la fois de l'humilité et de l'ambition.