Spectacle conçu par Victor Gauthier-Martin, écrit par Clémence Barbier, Victor Gauthier-Martin et Maïa Sandoz, mise en scène de Victor Gauthier-Martin, avec Clémence Barbier, Joseph Escribe, Victor Gauthier-Martin et Maïa Sandoz.

La Compagnie Microsytème, qui conçoit le théâtre comme le théâtre un lieu d’échanges et de prise de conscience citoyenne, propose avec "Round'up", titre inspiré du nom de l'herbicide total vendu comme inoffensif par la compagnie américaine Monsanto et qui s'est avéré grandement toxique, de s'interroger, voire se positionner, sur les dérives et des scandales de l'industrie agro-alimentaire.

A la une de l'actualité de manière récurrente, ce sujet constitue un vrai enjeu de société d'autant qu'il concerne les différents acteurs économiques de la chaîne alimentaire du producteur au consommateur qui ont pour dénominateur commun d'être citoyens et consommateurs, et un secteur économique inféodé aux multinationales de l'alimentation dont le pouvoir échappe à tout contrôle.

Or, celles-ci, cultivant l'opacité et la dilution des responsabilités, dictent leurs lois même aux Etats, des lois qui sont celles du profit qui doit rémunérer les insatiables associés-investisseurs qui ne sont ni des humanistes ni des philanthropes.

Alors le sujet est grave et polémique, tant en termes de santé publique que de risque écologique, comme le rappelle, en préambule à l'adresse au public, Victor Gauthier-Martin, qui a conçu et mis en scène la partition co-écrite avec Clémence Barbier et Maïa Sandoz qui l'accompagnent sur scène.

Mais le ton de ce dernier n'augure pas du registre du spectacle qui ne verse pas dans la gravité austère mêlée de pseudo-militantisme politique du théâtre documentaire.

Présenté comme construit à la manière d'une "émission théâtrale", il prend la forme d'une succession de tableaux éclectiques qui ressortissent au pamphlet dans son sens d'expression contestataire et dans lequel la violence du verbe est polie à l'aune de l'absurde, de l'humour et du tragi-comique.

De l'ode aux trois lettres de l'acronyme "OGN" qui se substitue à la Sainte Trinité pour promettre le paradis sur terre avec la manne des biotechnologies au reportage en immersion dans un élevage de dindes auprès de deux activistes écologiques novices qui en sont de belles en passant par la leçon de pâtisserie en compagnie d'une mutante "alimentaire" sur l'air de la chanson de Michel Legrand "Recette pour un cake d'amour" écrite pour le film "Peau d'Ane" de Jacques Demy, les trois épatants comédiens livrent un spectacle aussi jubilatoire que réflexif.

Ayant su combiner, dans un adéquat format court, la légèreté à l'intelligence, le réflexif à la dédramatisation et l'ironie au pragmatisme, Clémence Barbier, Maïa Sandoz et Victor Gauthier-Martin jouent efficacement sur tous les registres sans que cela ne desservent le sérieux du propos. Donc une très belle réussite.