"Vérité et amour". Le titre sonne comme celui d'une homélie. Mais point de sacré en l'espèce, que du profane et du prosaïque.
En quatrième de couverture, l'auteure, Claie Legendre, indique qu'il s'agit d'une référence à un "slogan célèbre" ("La vérité et l'amour doivent triompher du mensonge et de la haine") du dramaturge tchèque Vaclav Havel, opposant politique devenu président de la République chèque, pour résumer l'esprit de la Révolution de velours, mots qu'elle a voulu "faire résonner dans l'intimité de nos vies".
Cette intimité c'est celle d'une trentenaire féministe doublée d'une prof de gauche obédience communiste bobo ("C'est vrai que je suis aussi un peu Guerlain... Et Princesse Tam Tam, et Zadig et Voltaire") qui narre un séjour pragois qui va clôturer un mariage d'amour et huit années de vie commune.
Bien que son couple se soit délité, elle suit néanmoins son mari, un conseiller culturel non prénommé mais ironico-pompeusement surnommé le vice-consul, affecté à Prague. L'attitude de ce dernier est claire et patente : il ne l'aime plus mais préfère l'assommer de rebuffades pour lui rendre la vie impossible et que ce soit elle qui donne le signal de la rupture.
Elle, elle subit avec résignation, par amour, allant jusqu'à penser au suicide mais davantage en tant que posture romantique, mais aussi par pragmatisme opportuniste ("Si je quittais le vice-consul, serai-je capable de me remettre à travailler... C'est vrai que ça m'arrangeait bien d'être ici, de suivre le vice-consul et me vautrer dans la luxueuse oisiveté qu'il déposait à mes pieds").
Et puis, arrive un nouveau prince charmant. Alors succombera-t-elle ou pas au charme tchèque ?
Sur fond de pseudo panorama d'une colonie de Français de l'étranger, celle privilégiée des fonctionnaires du Quai d'Orsay, de vagues considérations sur la mentalité et les us et coutumes locaux et d'une machination politique avec agent double, la narratrice se répand sur ses déboires conjugaux et les vicissitudes de l'expatriation tant pratiques ("J'ai passé la première semaine à chercher des côtelettes d'agneau et des tampons avec applicateur"), psychosomatiques dues au "cortège d'angoisses" qui affecte les "femmes d'expat", que métaphysiques qui assaillent une communiste dont la conviction politique laisse perplexe ("Etre communiste avait été la seule façon pour moi d'appartenir au bon côté de l'histoire, et encore de la manière la plus noble par le choix") immergée dans un pays anti-soviétique.
Voilà. Ca se lit aussi vite que c'est écrit dans des chapitres courts, voire brefs, qui ressortissent au billet avec des titres à l'ironie confiture ("La putain de la République", "Roulette russe", "No sex last night", "Apocalypse now").
"Un chapitre par jour, parfois deux trois ou quatre, c'est l'avantage quand les chapitres sont très courts..." note l'auteure, diplomée de Lettres Modernes et professeur de création littéraire (sic!) à l'Université de Montréal, dans son journal en ligne.