Opéra bouffe de Franz Joseph Haydn d'après une pièce de Carlo Goldoni, mise en scène de Anne-Marie Lazarini, avec Jean-François Chiama, Karine Godefroy, Laurent Herbaut, Xavier Mauconduit, Romain Sénac, François Martigné, Guillaume Martigné, Jean-Marie Poupelin et Norbert Vergonjanne.

Le Théâtre Artistic-Athévains propose courageusement un ouvrage lyrique, ce qui démontre son éclectisme et confirme sa vocation de théâtre des Arts.

"L'Apothicaire", un des nombreux livrets écrits par Carlo Goldoni, offre, comme il convient, une trame simple. Un barbon, l'apothicaire Sempronio, convoite sa pupille, la ravissante Grilletta, autant pour ses charmes que pour sa dot. Mengone, jeune homme pauvre et amoureux pur de la même jeune fille, parvient à se faire engager comme laborantin auprès de Sempronio.

Mais un troisième homme, le fat et argenté Volpino, aspire également à Grilletta. Intrigues, travestissements, supercherie: l'amour et la jeunesse triompheront des écueils.

Anne-Marie Lazarini, maîtresse des lieux, a signé une belle mise en scène classique, ponctuée de quelques gags, judicieusement peu appuyés. Le décor de François Cabanat est superbe, choquant de beauté, assez anti-moderne, baigné de la lumière vénitienne qu'il a imaginé pour lui.

L'écrin peut accueillir les personnages. Karine Godefroy, magnifique soprano, incarne Grilletta avec charme et sa voix enchante et subjugue. Auprès d'elle, Xavier Mauconduit se révèle comme un ténor "à l'italienne", brillant, inspiré et comédien doué. Volpino, c'est Laurent Herbaut, baryton de classe, doublé, lui aussi, d'un acteur facétieux et drôle. Enfin, l'apothicaire, (alias Jean-François Chiama), homme complexe et tortueux, est joué par un chanteur baroque sensible et un comédien à la vraie présence.

Le chef d'orchestre - une dame, rareté - n'est autre qu'Andrée-Claude Brayer, également pianiste, qui a su s'entourer des excellents musiciens de l'Orchestre-Studio de Cergy-Pontoise (Romain Sénac, Guillaume et François Martigné, Jean-Marie Poupelin et Norbert Vergonjanne), de Liliane Bourdin-Hesson et d'Anne-Lise Saint-Amans. Les costumes de Dominique Bourde sont beaux, légers, somptueux.

Le spectacle transporte, charme, par sa qualité et la conviction des artistes.

On regrettera le titre original - "Lo Speziale" - qui ne dit rien à l'oreille française qu'une possible variante de pizza (de plus la mode est passée, on revient aux titres en français, clairs et compréhensibles par tous).

Nonobstant ce point mineur, on ne peut que se féliciter de l'audace de ce théâtre des Arts, à la programmation exigeante, qui défie ces "seul en scène" et autres duos misérabilistes qui essaiment partout, et affiche un des plus beaux spectacles de ce début d'année, à courir applaudir.