Comédie renversante d'Alexandre Lacouture mise en scène par Isabelle Legueurlier avec Myriam Coinem, Amaïa Deweerdt, Franck Jouglas et Paul Séré.
Trouver le théâtre des 3 bornes n’est pas le fruit du hasard. Ce minuscule café-théâtre de poche, sans hall d’accueil, dont la salle ouvre directement sur la rue, se trouve hors des sentiers battus. Et bien il faut absolument y aller (rue des 3 bornes dans le 11ème arrondissement parisien) pour voir Call me call girl qui se joue actuellement du mardi au samedi à 21 h 30 !
Dans ses notes, le jeune auteur, Alexandre Lacouture, annonce la couleur : "Comme l'a dit Quentin Tarantino : Faire du neuf avec du vieux ... Reprendre les codes et la structure du vaudeville pour en faire une sorte de Vaudeville Reloaded".
Cette introduction fort présomptueuse, même si elle comportait quelques bémols, plaçait la barre très haut et on pouvait craindre le pire. Et bien c’est du bon, et même du très bon dans le genre si on effectue un test comparatif.
La pièce démarre sobrement sur quelques petits quiproquos en chaîne, classiques et de bon aloi, histoire de capter l’attention du spectateur, de le prévenir tout de suite qu’il a intérêt à suivre parce qu’on ne va pas faire dans le linéaire, de présenter et de chauffer le quator dévastateur qui va sévir sur la scène.
Mattéo, comme Météo mais avec un "a", un brave chauffeur de taxi altruiste se rend à l’adresse du prochain rendez-vous indiquée sur l’agenda oublié par son client pour le lui rendre. S’agissant d’un rendez-vous galant avec la jolie call girl Faustine, comme Justine mais avec un "Fo", celle-ci le prend pour ledit client. Bien sûr arrive ledit client Monsieur Dulac.
Quand vous saurez que Faustine dispense à ses clients une union spirituelle, que cela indispose sa patronne Madame Heidi qui vend des prestations plus charnelles, que son propriétaire la poursuit pour loyers impayés, que sa voisine de palier est la jolie Mathilde qui est amoureuse de Mattéo et qui est l'employée syndicaliste de Monsieur Dulac qui est un chef d'entreprise véreux, vous aurez une petite idée des imbroglios qui vous attendent.
Dès que les fils sont bien emmêlés, avec une écriture efficace et des dialogues qui font mouche, tout part en vrille sans coup férir et on assiste à une avalanche de scènes gaguesques et un déluge d'imbroglios le tout sur un rythme effréné.
Toutes les formes de comiques et tous les registres y passent du pouet-pouet au non-sens, du yo de poêle à l’absurde, du youpla boum au décalé, du vaudeville au sitcom, du comics au boulevard, bref c’est un festival servi par une brochette de comédiens pas piquée des hannetons.
L'électricienne reconvertie dans la galanterie, c'est Myriam Coinem, une grande blonde naturellement, qui vaut bien Uma Thurman, indisponible (sic !), sexy liane flamboyante et ondulante qui d’un battement de cil et d’une moue à la Sylvie Vartan nous ferait prendre un bûcheron canadien pour une gogogirl.
Paul Séré, en patron véreux est désopilant : il commence complet tiré à quatre épingles et cheveux gominés pour finir, après la prise massive de pilules du désir qui l’ont scotché au mur comme une veille punaise, en cheveux hirsutes, tronche en biais et chemise au vent.
Franck Jouglas endosse la livrée hawaIenne du chauffeur de taxi ; touché par la grâce divine, en état permanent de BA, il a le don de compliquer les situations les plus simples et de provoquer les catastrophes.
Quand à Amaïa Deweerdt, elle joue dans tous les registres, de la diatribe véhémente aux classiques scènes de duos romantiques.
Une belle réussite...à ne pas rater ! Alexandre Lacouture a gagné son pari : "...n'est pas Quentin Tarantino qui veut. Mais j'ai fait de mon mieux pour écrire une pièce rythmée et divertissante qui plaira, je l'espère, au plus grand nombre ! »