Spectacle de Andréa Bescond, mis en scène par Eric Metayer avec Andréa Bescond.
Un dos qui lentement se redresse. La comédienne au premier plan est tournée vers le fond et déjà l'image captive...
L'histoire raconte le calvaire de la petite Odette, proie d'un pédophile ami de la famille depuis l'âge de 8 ans, violée pendant plusieurs années. Et qui mettra le reste de sa vie pour se reconstruire.
Après avoir triomphé pendant plusieurs années et récolté le Molière du meilleur Seul(e) en scène en 2016, "Les Chatouilles (ou la danse de la colère)", le spectacle créé en 2014 et interprété par Andréa Bescond revient.
Un bon moment s'est écoulé depuis qu'elle l'a joué (400 fois). Entre-temps, Andréa Bescond s'est occupée de son enfant et s'est faite remplacée pour jouer le rôle d'Odette. Mais l'appel de la scène était trop fort. Elle reprend donc le chemin des planches pour ce spectacle-choc qui aura été adapté avec succès au cinéma.
Dès les premières minutes, on est happé par ce jeu à la fois instinctif et d'une redoutable précision. L'approche physique du spectacle permet de faire ressentir toute la colère intérieure de la protagoniste au fil des années, tentant de réussir une carrière de danseuse avec le spectre de l'agression dont elle a été victime.
Avec une incroyable énergie, Andréa Bescond mène ce seule en scène impressionnant par sa construction, passant d'un personnage à un autre par un geste ou une inflexion de voix en un instant sans que l'on se perde. C'est prodigieux. L'ensemble est tenu d'un bout à l'autre avec une puissance peu commune et une utilisation optimale de l'espace, mis en scène au cordeau par Eric Métayer.
L'humour de certains personnages ainsi que les intermèdes dansés permettent quelques respirations dans un sujet qui prend au tripes et sidère entièrement, donnant à voir le mécanisme de l'horreur.
Et quand par la grâce d'une chorégraphie sublime sur une chanson de Maurane ou par le dialogue entre Odette et son enfant intérieur, l'émotion culmine, on se dit que sans doute jamais un spectacle n'avait eu autant d'efficacité pour dire la maltraitance, l'abus et donner aux victimes une force extraordinaire pour renaître à la vie.
Un long silence et des reniflements succèdent au noir final. Et puis la salle se lève, d'un bond.
Magistral.
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